Plus de 250 mille Roumains travaillent et étudient en Grande Bretagne - Bucarest espère négocier avec les autorités britanniques une solution qui leur permettra de continuer d’y vivre et d’y travailler
Une fois activé l’article 50 du Traité de Lisbonne, le principal objectif des autorités de Bucarest dans le cadre des négociations sur le Brexit est le respect des droits des ressortissants roumains qui travaillent et qui étudient au Royaume-Uni. Selon les estimations officielles, plus de 250 mille Roumains travaillent et étudient en Grande Bretagne. Que se passera-t-il avec cette communauté roumaine, impliquée dans tous les secteurs de la vie au Royaume-Uni ?
Dans une interview accordée à la Radio publique roumaine, Cristian Mititelu, ancien rédacteur en chef de la section roumaine de la BBC, affirme qu’à l’heure actuelle il n’y a aucune raison d’inquiétude : « Le Royaume-Uni est encore membre de l’UE et il le restera pour au moins deux années, sinon pour davantage de temps. On verra probablement les deux parties négocier un accord provisoire valable jusqu’à la sortie effective du pays de l’Union. Selon toutes les informations dont nous disposons à présent, les droits dont bénéficient les Roumains au Royaume-Uni seront respectés, même après cette rupture regrettable. Probablement qu’il y a également des domaines où les autorités seront plus exigeantes et où ceux qui y travaillent sans contrat seront plus vulnérables. Voici donc un aspect négatif, puisqu’en l’absence d’un contrat de travail et d’une relation avec le fisc britannique, ils ne bénéficient pas de soins médicaux gratuits ou quasi gratuits, ni d’aides sociales. D’ailleurs, le ministre britannique en charge des négociations affirme s’attendre au proche avenir à une flambée de l’émigration, alors que tout contrôle sur les émigrés sera institué à long terme. »
Radu Cinpoeş, maître de conférences à l’Université de Kingston de Londres, à la Faculté d’art et de sciences sociales, spécialisé en politique, droits de l’Homme et relations internationales, est plutôt pessimiste pour ce qui est de la perspective des Roumains sur le Brexit. Ses effets seront ressentis surtout pour ce qui est du droit au travail, mais aussi côté aides sociales. Radu Cinpoeş : «D’une manière ou d’une autre, tous les citoyens de l’UE seront affectés. Il est évident qu’après les négociations il y aura un processus de régularisation du statut des citoyens de l’UE. Même si le gouvernement britannique n’a pas voulu offrir de garanties sur les droits de ces citoyens, on finira par trouver un système qui leur permettra de continuer d’y vivre et d’y travailler. Cela aura ses coûts, bien évidemment. Il se peut bien qu’au cours de ce processus de régularisation, les ressortissants européens de Grande Bretagne, dont des Roumains, se voient obligés de demander la citoyenneté britannique. A l’heure actuelle, cela coûte environ 1200 livres sterling, une somme qui n’est pas à la portée de tout le monde. A part cela, jusqu’au moment de la naturalisation, ils seront privés de certains droits, comme l’allocation chômage par exemple et autres. La logique du bon sens suggère que la Grande Bretagne ne peut pas, c’est-à-dire elle qu’elle n’a pas la capacité de renoncer d’un coup à toutes ces catégories de gens, tout simplement parce qu’il y a des zones de l’économie britannique soutenues par les travailleurs de l’espace communautaire. Le BTP par exemple est un domaine qui compte beaucoup sur les ressortissants européens. Le système médical aussi, tout comme celui de l’assistance médicale et ainsi de suite. Voilà autant de domaines qui comptent énormément sur les immigrants venus de l’UE. »
Selon les statistiques officielles, quelque 3,3 millions de citoyens européens travaillent actuellement en Grande Bretagne, affirme la sénatrice Gabriela Cretu, présidente de la Commission pour les affaires européennes. Ceux qui ont une double nationalité ne seront pas affectés par tous ces changements. Pourtant, on ne saurait en dire de même des autres : «On ne garantit pas les mêmes droits collatéraux au travail pour les étrangers de Grande Bretagne. Et pour cause : un salarié bénéficie de toute une série de droits liés à l’éducation des enfants, à sa propre éducation tout le long de la vie, à la retraite, au chômage. Au moment du Brexit, les premiers qui en seront touchés ne seront pas les salariés, mais les personnes qui déroulent des activités en tant qu’entrepreneurs, car elles perdront le droit de bénéficier de tout ce qui relève du marché intérieur et de la prestation de services dans un Etat membre de l’UE. Ces gens-là n’auront plus droit aux aides, au chômage, aux allocations familiales etc. ».
Un danger que courent aussi de nombreux Roumains. Les Polonais sont encore plus nombreux, car selon les chiffres officiels, ils sont environ 237.000, mais leur nombre réel est sans doute plus grand, conclut Gabriela Cretu. (Trad. Alex Diaconescu, Valentina Beleavski)
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