Coronavirus en Roumanie/ Amender les amendes/ La CEDH versus la CCR/ La crise post pandémie/ Une aide fraternelle/ L’autonomie en temps de pandémie
1. Coronavirus en Roumanie
Près de 15.000 contaminations et près d'un millier de décès - tel est le bilan de l'épidémie de Covid-19 en Roumanie. Le président Klaus Iohannis a mis en garde que la situation ne s'était pas améliorée et que l'épidémie n'était pas passée. Toutefois, il a réitéré l'annonce qu'après le 15 mai, l'état d'urgence mis en place à la mi-mars serait levé et remplacé par l'état d'alerte. Les Roumains pourront de nouveau circuler librement, sans attestation dérogatoire. Les salons de beauté, les cabinets dentaires et les musées vont rouvrir, mais en observant la distanciation sociale et avec l'obligation de porter le masque. Cet accessoire devient obligatoire aussi dans les transports en commun. Les mesures de déconfinement ne s'appliquent pas aux localités placées en quarantaine, telles que Suceava (nord-est), Ţăndărei (sud) et deux quartiers de Buzău (sud-est).
2. Amender les amendes
La Cour constitutionnelle de Roumanie, pour laquelle beaucoup ont de l'antipathie et que beaucoup contestent, demeure un arbitre aux décisions implacables. Suite à la saisine formulée par l'Avocat du peuple (l'équivalent du Défenseur des droits français), les juges de la Cour ont décidé que les amendes appliquées pendant l'état d'urgence pour non-respect de la quarantaine et de la quatorzaine étaient anticonstitutionnelles. Elles ne seront pas pour autant automatiquement annulées, mais doivent être contestées en justice. Le premier ministre libéral Ludovic Orban considère que, par cette décision, le gouvernement et les autres autorités sont empêchés de protéger la santé et la vie des Roumains. Le ministre des Finances, Florin Cîţu, a tenu à préciser que le rôle des amendes n'avait pas été de faire des recettes au budget de l'Etat, mais de réduire le risque de propagation de l'épidémie. Antérieurement, toutefois, son collègue de l'Intérieur, Marcel Vela, déclarait qu'il était évident que certains policiers avaient commis des abus au moment des vérifications relatives à la libre circulation. Depuis la mise en place de l'état d'urgence, les amendes infligées aux citoyens roumains pour non-observation des dispositions des autorités sont de l'équivalent de 120 millions d'euros.
3. La CEDH versus la CCR
La procureure roumaine Laura Codruţa Kövesi a eu gain de cause à la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), dans le procès ouvert contre l'Etat roumain, où elle contestait sa révocation du poste de procureur en chef de la Direction nationale anti-corruption de Roumanie. Le limogeage de la procureure a eu lieu en 2018, lorsque la Cour constitutionnelle avait obligé le chef de l'Etat à signer un décret en ce sens. La CEDH a décidé à l'unanimité que Mme Kövesi s'était vu refuser le droit à un procès équitable et le droit à la liberté d'expression, et qu'elle avait été destituée avant la fin de son mandat à la tête de la DNA. A présent cheffe du nouveau parquet européen chargé de lutter contre les fraudes aux fonds européens, Laura Codruţa Kövesi a précisé qu'elle n'avait pas l'intention de demander des dommages-intérêts, car ils seraient payés par les contribuables de Roumanie.
4. La crise post pandémie
Dans ses prévisions de ce printemps, la Commission européenne estime une contraction de 6% de l'économie roumaine d'ici la fin de l'année. Cette récession s'inscrira dans une crise économique plus vaste, la pire que l'UE ait jamais connue. L'Union essuiera une contraction record de 7,4%, selon le commissaire européen aux affaires économiques et monétaires, Paolo Gentiloni. A ses dires, la Roumanie risque d'afficher un déficit budgétaire d'au moins 8%, selon le modèle de tous les autres pays membres obligés de débloquer des liquidités pour soutenir l'économie et protéger les emplois. Selon les prévisions économiques de la CE, la Roumanie aura un taux d'inflation de 2,5% avant la fin de l'année, un taux de chômage de 6,5% en 2020 et de 5,4% en 2021.
5. Une aide fraternelle
Le jeudi, 7 mai, un convoi de 20 camions transportant des équipements sanitaires, offerts par la Roumanie à la République de Moldova voisine, est arrivé à sa destination. Une délégation officielle formée du ministre de la Santé, Nelu Tătaru, du chef du Département pour les Situations d'Urgence, Raed Arafat, et de la secrétaire d'Etat chargée de la relation avec Chişinău, Ana Guţu, s'est rendue sur place. Le gouvernement de Bucarest a décidé d'accorder à son voisin moldave une aide humanitaire de 3,5 millions d'euros sous forme de médicaments, équipements et dispositifs sanitaires. Par ailleurs, la Roumanie a envoyé en République deMoldova plusieurs dizaines de médecins et d'infirmiers pour aider leurs confrères moldaves à soigner les malades de COVID- 19.
6. L'autonomie en temps de pandémie
Le Sénat de la Roumanie, en tant qu'assemblée décisionnelle, a rejeté, à une large majorité, le projet de loi concernant le soi-disant « Pays sicule », au centre de la Roumanie. Cette contrée serait devenue une région autonome, à personnalité juridique. Antérieurement, le projet législatif, sous la forme déposée par ses auteurs de l'Union démocrate des Magyars de Roumanie, avait été adopté tacitement, donc sans débats, par les députés. Seule zone à population majoritaire d'ethnie magyare, le Pays sicule aurait inclus les départements de Covasna et de Harghita ainsi qu'une partie du département de Mureș ; il aurait eu une organisation administrative séparée et ses propres institutions, la langue hongroise aurait été utilisée en tant que langue officielle et les symboles de la nation hongroise auraient pu être affichés. Ce fut ensuite le tour de la Chambre des députés de rejeter un autre projet de Code administratif, adopté tacitement par les sénateurs. Initié lui aussi par l'UDMR, ce projet autorisait l'utilisation des langues des minorités nationales dans l'administration locale et les institutions publiques des localités où plus de 20% de la population appartenait à une ethnie minoritaire ; il autorisait aussi à hisser le drapeau sicule sur les institutions publiques. Le président Klaus Iohannis a accusé avec véhémence l'opposition sociale-démocrate, qui contrôle néanmoins les deux Chambres du Parlement, de complicité avec l'UDMR et avec Budapest. Les leaders du Parti social-démocrate ont contre-attaqué sur le même ton, et l'atmosphère politique s'est à nouveau embrasée, typiquement pour une année électorale marquée par deux scrutins - local et législatif. (Trad. : Ligia Mihăiescu, Ioana Stăncescu, Ileana Ţăroi)
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