L’enseignement à distance

l’enseignement à distance Parmi les multiples facettes de notre quotidien bouleversé par la pandémie et par ses contraintes, on retrouve l'enseignement, massivement transféré sur les plateformes en ligne.

La pandémie provoquée par le nouveau coronavirus a profondément bouleversé l'ensemble des activités humaines, obligées de s'adapter, ne fut-ce que provisoirement, à la baisse des interactions sociales, réduites à leur plus simple expression dernièrement. Chose inimaginable encore au début de l'année, le quotidien d'aujourd'hui semble s'inspirer d'un film noir hollywoodien. Face à des gens, confinés pour la plupart, isolés, déployant des ressources d'imagination pour éviter tout contact humain, la vie sociale et les activités professionnelles ont emménagé, tant bien que mal, en ligne. 


Le virtuel a pris la place de ce qu'était la réalité auparavant, il est devenu notre quotidien. Ce virtuel, mis récemment encore sur la sellette, est devenu, du jour au lendemain, le nouvel Eldorado. On y investit du temps, de l'argent, voire des émotions. Et cette approche risque de perdurer, peut-être bien plus que la période de la pandémie. Un monde nouveau s'est invité dans nos vies tambour battant, et la manière dont il nous façonnera l'avenir reste encore à déceler. 


Parmi les multiples facettes de notre quotidien bouleversé par la pandémie et par ses contraintes, on retrouve l'enseignement, massivement transféré sur les plateformes en ligne. Profs et élèves de tous âges, parents, amenés parfois au bord de la crise de nerfs, ont tous dû réinventer de nouvelles formes d'interaction, de nouvelles manières de communication afin de poursuivre l'œuvre de l'éducation nationale. Si pour certains le changement est allé de soi, d'autres peinent encore dans les limbes d'Internet. Les moyens techniques et les ressources dont disposent certains ne sont sans doute pas accessibles à tous. Et, en effet, il est à craindre que ces décalages, présents dès le départ, ne donnent naissance à une école à plusieurs vitesses. 


Pour essayer d'y voir plus clair, nous sommes allés à la rencontre du président de l'Académie roumaine, le professeur des universités Ioan Aurel Pop : « L'enseignement à distance, je ne le perçois qu'en tant que solution d'urgence, forcément provisoire, limitée à la durée du confinement. Cela ne devrait pas perdurer. Vous savez, depuis que l'école est apparue, du temps des Grecs et des Romains, l'enseignement présuppose la présence physique de l'enseignant, du maître d'école, du prof. Par conséquent, je ne suis pas d'avis de poursuivre l'expérience de l'enseignement à distance au-delà du strict nécessaire. Je ne pense pas que ce type d'enseignement ait de beaux jours devant lui. Certes, il pourrait voir sa place mieux valorisée à l'avenir, parce que ce type d'enseignement existait déjà, au niveau national, mais aussi international, il se pourrait que certains choisissent de privilégier cette forme d'enseignement, mais, pour ma part, je le répète, je demeure partisan de l'enseignement classique, qui présuppose présence et contact, ce face-à-face irremplaçable, le regard de l'élève dans les yeux du maître, ce contact qui rend perceptible l'émotion que le maître essaye de transmettre. La transmission du savoir, entre humains, se fait de la sorte, c'en est ainsi. »


Cependant, le ministère roumain de l'Education nationale saute sur l'occasion pour former les profs à maîtriser l'outil et la technique de l'enseignement à distance, compétences utiles pour des circonstances exceptionnelles, telle celle que nous traversons dernièrement. Le curriculum de formation des profs intègre ainsi des programmes de formation psychopédagogique, censés faire acquérir aux profs les compétences nécessaires pour intégrer l'utilisation de la technologie dans le processus d'enseignement et d'évaluation. Nombre d'informations ont d'ores et déjà été mises en ligne, à la disposition des enseignants, des élèves et des parents, les trois acteurs de l'enseignement à distance.


Le ministère a également consacré le principe de la présence des élèves aux cours dispensés en ligne, réunis sur un portail dédié. Aux parents en revanche d'assurer les conditions nécessaires. Même son de cloche chez le professeur Varujan Pambuccian, informaticien et mathématicien connu, qui pense à son tour que le système de l'enseignement à distance ne survivra pas au-delà de la période de la pandémie : « Je ne vais pas trop miser sur le développement rapide de ce système d'enseignement en ligne. Une fois la crise passée, nous nous retrouverons dans l'ancien paradigme. Il ne s'agit pas de le souhaiter ou non. Finalement, cela relève d'un état de nécessité. Certes, il se pourrait que l'on ait besoin de remettre le couvert à l'avenir, il vaut donc mieux s'y préparer. Ecoutez, sur la question de la numérisation, il y a eu des pays qui ont poussé les choses en ce sens. Ils les ont trop poussées, et dans une mauvaise direction. C'est mon avis. L'apprentissage c'est un processus social, le facilitateur, c'est l'enseignant, c'est lui qui fait découvrir aux enfants ce que la société souhaite qu'ils découvrent. Et la présence de ce facilitateur est essentielle dans la dynamique du processus. Découvrir ensemble, participer au processus social d'apprentissage, il s'agit là d'éléments essentiels, cela relève de notre structure mentale, une structure qui n'a pas beaucoup évolué. Il faudrait trouver des solutions pour transposer en ligne la réalité que l'on connaît, celle qui est inscrite dans notre ADN culturel. Sinon, on peut tomber dans l'admiration de ce système d'enseignement à distance très facilement, on peut même essayer de forcer les choses, mais je parie que tout le monde va très vite retrouver ses marques d'avant, parce que cela relève de notre structure mentale, de notre cerveau. »


Par ailleurs, l'enseignement à distance, dispensé en ligne, soulève une kyrielle de problèmes, parfois insurmontables, pour certains. En effet, les associations mettent en exergue l'absence d'accès à Internet dans certaines zones rurales et isolées, le manque de ressources des parents ou encore les habilités très diverses des enseignants à maîtriser l'utilisation de ces plateformes. Enfin, les moyens limités pour surveiller le travail des élèves que permet l'utilisation de ces plateformes ou encore le support logistique, parfois défaillant, que peuvent fournir les écoles, constituent d'autres barrières importantes devant le succès de l'expérience. 


Selon une étude réalisée pour évaluer ce domaine en Roumanie, Zoom, WhatsApp, Google, Classroom et Facebook ont été les plateformes les plus utilisées en l'occurrence. 36% des profs ont affirmé avoir suivi les formations dédiées à l'utilisation des outils numériques. Seul un enseignant sur cinq employait l'ordinateur portable avant la suspension des cours, alors que 19% utilisaient le rétroprojecteur. Enfin, si un enseignant sur dix était un habitué des plateformes digitales, moins de 7% faisaient appel aux manuels numériques. Quant aux élèves, ils semblent jeter leur dévolu, dans l'ordre, sur la plateforme de mathématiques, suivie par celle destinée à la langue et à la littérature roumaine, puis à celles vouées à l'apprentissage des langues étrangères. Bon à savoir. (Trad. Ionut Jugureanu)



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Publicat: 2020-05-08 13:33:00
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