Les communautés locales face au progrès technologique

les communautés locales face au progrès technologique Comment peut-on conserver la spécificité naturelle de la zone longeant la rivière Topolog ?

Au cours des 30 années écoulés depuis la chute du communisme, en Roumanie, le secteur du bâtiment a connu un essor remarquable. Mais souvent son développement s'est avéré assez chaotique : immeubles résidentiels trop hauts érigés au beau milieu de quartiers de villas à un seul étage, constructions en verre et acier apparues tout près d'immeubles historiques ou encore des constructions ayant différentes formes et couleurs. Le résultat est un désordre assez fatiguant. Le chaos architectural, des milieux urbain et rural est principalement le résultat de l'absence de normes claires dans le secteur du bâtiment. S'y ajoutent aussi les autorités qui souvent ferment les yeux face aux transgressions au code d'urbanisme. 


Aujourd'hui nous faisons la connaissance de Cristina et de Paul Budan, les initiateurs d'un projet qui, une année durant, a étudié l'architecture vernaculaire de la partie supérieure de la rivière Topolog dans le département d'Arges, dans le sud, afin trouver des solutions pour sa conservation. Pourquoi ? Eh bien parce que la région sera traversée à l'avenir par une autoroute. Or, l'initiative des époux Budan vise justement à concilier le progrès et la spécificité de l'endroit. Ou bien, si le changement est inévitable, il faudrait au mettre sur papier la façon de vivre des habitants des parages pour la rendre accessible à la postérité.


Cristina Budan est assistante universitaire à la Faculté d'architecture de l'Université Ion Mincu et elle nous explique les principaux repères du projet déroulé le long de la rivière Topolog : « Le projet visait à cartographier toute la partie supérieure de la Vallée du Topolog, afin de découvrir quels éléments d'architecture traditionnelle pourront survivre et aussi pour passer en revue les éléments qui disparaitront suite à la construction d'un segment de l'autoroute reliant les localités de Cornetu et de Tigveni. Celui-ci traversera la vallée et changera le plus probablement toute la région. A présent, la vallée est assez paisible parce qu'il n'y a aucune route majeure et c'est pourquoi elle s'est conservée tellement bien et que l'architecture traditionnelle se soit préservée sans aucun effort considérable dans la région. Evidemment, la nouvelle infrastructure produira des changements notables dans la structure des villages, dans l'évolution de la région et aura un impact sur le patrimoine architectural ».


Côté expériences, quelles révélations ont eu les nombreux volontaires qui ont cartographié la partie supérieure de la vallée de la rivière Topolog ? Cristina Budan répond : « Comme il n'y a aucune route majeure, la vallée est particulièrement calme et autonome. Ce qui est intéressant, c'est le fait qu'elle fonctionne comme une région unitaire, homogène. C'est très beau de vivre dans cette vallée, dans le sens où les habitants possèdent des maisons, des vergers, des pâturages et par leurs activités quotidiennes font l'unité de ce lieu. Ce fut la première chose que nous avons aimée. Les routes sont spectaculaires, surtout lorsqu'on sillonne les collines adjacentes. C'est une très belle expérience que de parcourir la vallée et les chemins menant aux maisons historiques sont superbes. Nous y avons trouvé de très belles maisons, difficiles à classifier. Nous avons eu du mal d'ailleurs à identifier des typologies claires, parce qu'elles sont tellement variées. Nous avons trouvé des maisons dotées de très belles vérandas, que l'on peut inclure dans l'architecture traditionnelle, mais nous avons également découvert des maisons aux murs particulièrement décorés, avec des toits très raffinés et complexes. Bref, toute une richesse de l'expression traditionnelle, que nous ignorons le plus souvent. Il est très important pour nous de garder une base de données, avec tout ce qui existe actuellement et avec des témoignages de la manière dont la vallée fonctionne. En fin de compte, les maisons témoignent de la vie dans ces lieux. Et nous avons décidé de faire une base de données avec différentes maisons, avec les formes qu'elles peuvent avoir, afin de montrer la variété de l'architecture locale. »


Paul Budan habite actuellement à Bucarest. Néanmoins, ce projet est particulièrement important pour lui, vu que la région longeant la rivière de Topolog est sa région natale. Il y passe les étés et il est particulièrement concerné par l'aspect que la région aura après la construction de l'autoroute.


Paul Budan nous fait part de ses impressions : « Il est difficile d'imaginer une telle transformation. En quelques années seulement, la vallée sera probablement un grand chantier, mais à la fin, peut-être avec l'aide des autorités, elle se développera d'une manière harmonieuse, nous l'espérons bien. Il faudra refaire les rives, les sentiers et les ponts, peut-être proposer plusieurs types de nouvelles constructions locales, y compris des constructions desservant l'autoroute - parkings, hôtels, gites ruraux - qui aident à préserver la spécificité locales et la cohérence architecturale de la vallée. Ce projet permettra d'initier un dialogue et de réunir les autorités locales et centrales pour faire reconstruire la vallée d'une manière harmonieuse. Nous espérons avoir une influence positive et intervenir d'une manière bénéfique dans ce processus de changement ».


Certes, notre invité parlait d'un dénouement idéal. Si, malheureusement, tel ne sera pas le cas, l'initiative de Cristina et Paul Budan restera un travail exceptionnel de documentation, rendu possible aussi par l'Ordre des architectes de Roumanie, le musée du village de Bucarest, celui de la viticulture et de la pomoculture de Golesti, au compté d'Arges, mais aussi grâce à la participation des spécialistes en histoire, sociologie, géographie, sans oublier ni les bénévoles, notamment des étudiants en architecture, ni le professionnels du secteur. Les résultats de leur travail sont à retrouver sur le site petopologinsus.ro, sur la page Facebook du projet et surtout dans un album dont la qualité, le contenu et la taille sont vraiment exceptionnels. 


Cristina Budan conclut : « Il faut l'avouer : la modernisation est nécessaire et nous la souhaitons tous et, d'ailleurs, tous ces projets sont particulièrement nécessaires. Par ailleurs, la manière dont ces chantiers se déroulent est très importante. D'abord, parce qu'un projet d'infrastructure ne devrait pas modifier le développement futur de la contrée. Nous espérons qu'il apportera cette richesse promise et qu'il fera plus de bien de que mal à cet endroit ». 


Pour résumer les paroles de Cristina Budan, assistante universitaire à la Faculté d'architecture de Bucarest, qui sont un véritable slogan - oui au progrès mais pas à n'importe quel cout !  (trad. Alex Diaconescu)



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Publicat: 2022-06-29 14:11:00
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