Vrai et faux sur le changement climatique
De plus en plus débattu ces derniers temps, le changement climatique reste un sujet propice aux mythes et au greenwashing, ou écoblanchiment. Toutefois, de l’avis des experts, à commencer par l’empreinte personnelle de carbone et jusqu’aux solutions techniques miraculeuses, les grand compagnies polluantes investissent dans une fausse information du public, afin de ne pas opérer les changements qui s’avèrent vraiment nécessaires. Mythes et réalités autour du changement climatique.
Iulia Hau, 14.05.2025, 11:23
Les combustibles fossiles en question
Selon les études les plus récentes, les combustibles fossiles sont responsables de 90 % des émissions de dioxyde de carbone d’origine humaine, de l’augmentation des températures annuelles, de l’acidification des océans et de l’accélération du risque d’extinction des espèces. L’on estime qu’une espèce sur trois disparaîtra au cours des 50 prochaines années si l’industrie des combustibles fossiles n’est pas profondément transformée.
Selon Daria Hau, ancienne conseillère au Ministère de l’Environnement, qui a obtenu son master en Droit international commercial dans le contexte des changements climatiques, à Amsterdam, la discussion sur le changement climatique abonde en fait des fausses informations :
Deux mythes démontés sur la crise climatique
« Il y a au moins deux « mythes » véhiculés par les grandes entreprises polluantes qui n’ont pas été démontés comme il fallait. Le premier : le recyclage du plastique. Le second: la technologie. Beaucoup d’entre nous, nous avons grandi avec l’idée que, si l’on recycle avec persévérance, on protège la planète. En fait, le recyclage de tout matériel est important, mais, en ce qui concerne le plastique, l’histoire est incomplète, voir trompeuse, car, en réalité, la plupart du plastique produit au niveau mondial, soit plus de 90 %, n’est pas du tout recyclé. Qui plus est, la plupart des types de plastique ne sont même pas produits pour être recyclés et ne seront jamais recyclés. C’est là une idée reçue, à cause de laquelle on se ne culpabilise pour ne pas avoir recyclé les emballages de nos achats, alors que la production de plastique à usage unique est constamment à la hausse. La seconde idée reçue est celle sur la technologie, qui dit qu’il ne faut pas réduire les émissions le plus rapidement possible, car bientôt nous aurons à notre disposition des solutions miraculeuses, comme la possibilité de capter le carbone dans l’atmosphère. Le problème en est que ces technologies sont extrêmement chères et, donc, elles sont financées grâce aux subventions. Alors, en plus d’être très coûteuses, elles sont aussi inefficaces et marginales à l’échelle mondiale. Elles sont promues surtout par les grandes compagnies pétrolières, qui tentent de créer l’illusion que l’extraction de pétrole et de gaz pourrait se poursuivre, car l’on parviendra à dépolluer les émissions grâce à ces nouvelles technologies. Je me permets de paraphraser le chef d’une compagnie pétrolière qui a déclaré en direct à la télé que ce type de technologie permettra à l’industrie d’exploitation de fonctionner pendant encore 70-80 ans. Donc, les industriels l’avouent eux-mêmes : leur objectif est de permettre à l’industrie de continuer à polluer, sous couvert de la promesse des technologies très avancées qui dépollueront tout ».
Mettre les projecteurs les grands pollueurs industriels
Néanmoins, Daria Hau souligne que ces solutions, soit le recyclage et les technologies avancées, ne sont pas inutiles et qu’il faut y investir. Le problème c’est qu’elles sont présentées d’une manière exagérée en tant que solution universelle à la crise climatique. Alors qu’en réalité, elles ne font que détourner l’attention publique de l’essentiel : il faut avant tout responsabiliser les grands pollueurs et adopter des politiques climatiques audacieuses et systémiques.
Notre invitée dénonce une autre méthode de greenwashing (écoblanchiment), soit d’écologisme trompeur, superficiel, utilisée par les entreprises polluantes, à savoir : l’importance excessive accordée à la responsabilité individuelle :
« Il y a plein de slogans du genre « Le changement, c’est toi ! » ou « Que fais-tu pour protéger l’environnement ? » – à la base, c’est une bonne question, que chacun d’entre nous devrait se poser. Mais lorsqu’elle est adressée par les grands pollueurs pour nous contourner et nous empêcher de leur poser à eux cette question, de leur demander ce qu’ils font, eux, exactement en ce sens – c’est à ce moment-là que l’on a à faire une situation de « greenwashing » ou écoblanchiment. A mon à vis, l’exemple le plus important c’est la compagnie pétrolière qui a lancé dans les années 2000 le concept d’empreinte carbone personnelle, aux côtés d’un logiciel en ligne qui calculait combien de dioxyde de carbone chaque individu émet pour vivre et travailler. Les résultats de cette campagne sans aucun fondement scientifique, on les ressent aujourd’hui encore. Il y a des compagnies autochtones qui ont repris cette campagne et ont avancé à leur tour l’idée que nous sommes les responsables, par notre comportement quotidien. Malheureusement, on ne peut pas stopper la crise climatique seulement en pédalant sur nos bicyclettes. Premièrement, c’est à l’aide des politiques publiques que le changement réel peut se faire, des politiques qui nous encouragent à modeler notre comportement. Et deuxièmement, c’est par la réduction des émissions à la source, là où elles sont générées massivement dans l’industrie. »
Bref, ce que Daria Hau explique c’est que nous, les citoyens Lambda, on n’a pas la capacité de lutter seuls contre la crise climatique. Pourtant, nous avons la capacité de nous informer, de voter et de savoir ce qu’il faut demander aux leaders qui décident de la voie dans laquelle notre pays doit continuer.
Quelles solutions réelles pour lutter contre la crise climatique?
Au-delà des idées reçues et des campagnes censées semer la confusion, quelles solutions réelles avons-nous pour arrêter les changements climatiques ? L’experte répond :
« A mon avis, la première chose qu’il faut faire, c’est d’être très clairs en ce qui concerne la cause. Les combustibles fossiles sont au centre de cette crise, qui met réellement en danger la stabilité de la vie sur la Terre, dans toute sa complexité. Chaque étape de la chaîne fossile est génératrice de gaz à effet de serre qui réchauffent la planète, qui causent des millions de décès prématurés, des dégâts à hauteur de trillions de dollars et une déstabilisation de plus en plus profonde de nos écosystèmes. Alors, si l’on veut vraiment réduire les effets du changement climatique global, il faut nous concentrer sur la réduction de la dépendance à cette source. Certes, il faut assurer une transition juste pour les travailleurs du domaine et pour les communautés dépendantes de l’énergie issue des combustibles fossiles. Bref, il faut regarder de très près les catégories qui sont le plus touchées par ces combustibles : les enfants, les femmes etc. Et tout cela doit se faire avant 2050 au plus tard, si l’on veut avoir une chance de ne pas dépasser de trop le seuil critique de 1,5 °C, que nous avons déjà quelque peu dépassé, selon les statistiques ».
Le Rapport de la Banque Mondiale
Réalisé par la Banque Mondiale en 2023, le Rapport sur le Climat et le Développent concernant la Roumanie montre que notre pays a le potentiel de tripler ses recettes nationales dans les 30 années à venir, à condition de prendre des mesures visant à consolider sa résilience climatique et à réduire les émissions de carbone. Le même document fait état de la vulnérabilité accrue de la Roumanie face aux risques causés par les changements climatiques, notamment en matière d’inondation et de sécheresse.
Disons pour terminer que le niveau de dioxyde de carbone généré par l’économie roumaine est 2 fois et demie plus élevé que la moyenne de l’Union européenne, alors que la hausse des températures et l’intensification des vagues de chaleur sont de vrais dangers pour la population, pour l’économie et pour les infrastructures. Autant de raisons de penser plus sérieusement à l’avenir. (Trad. Andra Juganaru, Valentina Beleavski)