Le courrier des auditeurs du 27.06.2025
Alex répond à vos messages et questions
Alex Diaconescu, 27.06.2025, 16:49
Bonjour à tous et à toutes ! Je suis très heureux d’animer un nouveau le Courrier des auditeurs de RRI, l’émission phare de notre antenne. L’été est bel et bien installé et une bonne partie des Roumains sont déjà partis en vacances, d’autres s’occupent de différents travaux de rénovation ou de construction chez eux et d’autres encore affrontent de plein fouet la fièvre des examens : baccalauréat, brevet, licence et master. Du moins, la scène politique semble se calmer un peu, après l’installation d’un nouveau gouvernement, la mise en place d’une coalition gouvernementale et la présentation d’un programme de gouvernement constitué de mesures d’austérité certes douloureuses, mais tout aussi nécessaires pour nous tous. Espérons qu’elles auront du moins les effets escomptés.
Et si je viens de mentionner les examens, j’avoue que j’ai eu pas mal d’émotions cette année, puisque mon fils aîné, Luca, vient de passer son examen du brevet. Toute la famille se sent comme si elle-même vient de participer à un véritable marathon. D’ailleurs, pour la vaste majorité des jeunes roumains, la dernière année de collège est presqu’entièrement consacrée aux préparatifs en vue des examens de mathématiques et de langue et littérature roumaine. Pourquoi la note décrochée à ces examens est-elle tellement importante ? Parce que c’est le classement des moyennes obtenues au brevet, appelé en Roumanie « évaluation nationale », qui décide l’accès à un lycée. Et comme vous pouvez le deviner, surtout dans les grandes villes, il y a de bons lycées, des lycées moyens et des moins bons. Il est quasiment obligatoire de prendre des cours privés de roumain et de mathématiques et de résoudre des tests d’entrainement pour le brevet presque chaque jour. Par exemple, mon fils en a fait 200 – tant en mathématiques, qu’en roumain. Et il faut constamment se souvenir que ce n’est pas un sprint, mais un marathon. C’est pourquoi cet examen se transforme une année durant en une véritable obsession pour les familles roumaines. Et la publication des résultats ne met pas fin aux émotions puisqu’elle est suivie par l’inscription aux lycées et par la distribution numérique aux élèves dans les établissements pour lesquels ils ont opté, en fonction des moyennes. Le processus s’achève fin juillet et ce n’est qu’à ce moment-là que les jeunes et leurs familles sauront enfin à quel lycée ils devront se rendre en automne et pourront enfin souffler. Somme toute, un autre cycle d’enseignement doit commencer pour les jeunes roumains, un cycle dont le principal objectif est de se préparer pour le suivant.
Et je passe maintenant à vos questions et messages. Je commence par M Paul Jamet de France qui nous avait annoncé dans un mail que : « le 20 mai c’est la journée mondiale de l’abeille, journée instituée par l’UNESCO. Pourquoi le 20 mai ? Le 20 mai coïncide avec l’anniversaire d’Anton Janša, qui, au 18ème siècle, fut le pionnier des techniques apicoles modernes dans sa Slovénie natale et rendit hommage à l’abeille pour sa capacité à travailler dur tout en n’ayant besoin que de peu d’attention. Est-ce que cette journée est marquée par des événements particuliers en Roumanie ? Quelle est l’importance du miel dans l’économie roumaine ? Quid de l’importance de la transhumance des ruches ? Les Roumains consomment-ils beaucoup de miel ? » Autant de questions que notre ami nous pose. Cher ami, vous vous souvenez des camions de ruches placés en plein champ dans la région de Dobroudja, dans le sud-est de la Roumanie ?
La production de miel en Roumanie
Eh bien, sachez donc que la Roumanie est un des leaders de la production apicole de l’Union européenne. En effet, ce n’est que l’Espagne qui possède plus de familles d’abeilles et une production plus grande que la Roumanie. Sa production tourne autour des 20 000 tonnes par an, dont plus de la moitié est exportée. Selon d’autres statistiques, ce taux s’élèverait à 70%. Malheureusement, selon la presse économique, le miel roumain est exporté surtout en vrac et ce n’est qu’à l’extérieur qu’il est revendu en détail sous des marques plus commerciales. Certes, les producteurs autochtones font de beaux profits, mais la plus valeur ajoutée aurait pu être encore plus élevée. Côté consommation interne, sachez qu’elle n’a fait qu’augmenter ces dernières années, pour se chiffrer, selon les statistiques du ministère de l’Agriculture, à 1,2 kilo de miel par personne par an. C’est un chiffre contesté par les associations des apiculteurs de Roumanie, selon lesquelles les Roumains en consommeraient beaucoup moins, environ la moitié, soit 600 grammes. Côté prix, sachez qu’ils diffèrent largement en fonction de variété choisie. Mais en moyenne, pour un grand bocal de 900 grammes comptez débourser à commencer par 5 euros environ dans un supermarché, jusqu’à 10 euros, voire plus, chez un producteur artisanal certifié. Faites pourtant attention à bien lire les étiquettes, puisque souvent on découvre que les hypermarchés vendent des mélanges de miels de basse qualité de différentes origines : Roumanie, Ukraine, Turquie et même Chine. C’est un peu pareil à la situation de l’huile d’olives. Si le prix est trop bas, alors le produit pourrait être une contrefaçon. Les passionnés du miel de Roumanie ont chacun leur propre fournisseur de miel bio ou bien connaissent personnellement un apiculteur qui sillonne les différentes régions de la Roumanie, comme ceux que vous avez observé durant votre voyage en Dobroudja.
Et je passe maintenant au mail que nous a envoyé notre fidèle auditeur Philippe Marsan de France. Nous vous remercions pour le très détaillé rapport d’écoute et je me pence un peu sur la question qui l’accompagne : « Serait possible en quelques mots de nous expliquer ce qu’est plus exactement cette partie de la Moldavie (République de Moldova) que l’on nomme la Transnistrie ? Merci à vous. »
Clin d’œil sur la Transnistrie
D‘abord, je commence par une explication étymologique. Traditionnellement, ici chez RRI nous utilisons l’expression « République de Moldova » pour désigner l’ex-république soviétique roumanophone. C’est sous ce nom qu’elle est représentée à l’ONU tant en français qu’en anglais – Republic of Moldova. De plus, nous utilisons « République de Moldova » pour faire la différence entre ce pays et la région historique de Moldavie qui fait partie de la Roumanie actuelle. Et pourtant, nous avons commencé à utiliser aussi République de Moldavie puisque cette expression utilisée actuellement par les institutions européennes. Finalement, c’est l’usage qui fait la norme. Au sujet de la Transnistrie, sachez que c’est un territoire situé à l’est de la rivière du Dniestr, ayant appartenu dès le Moyen Age au duché lituanien-polonais, aux Tatars, aux Ottomans et enfin à la Russie des Tsars. Mais dès le Moyen Age ce territoire accueillait aussi une population roumanophone et il y a plein de sources historiques attestant leur présence. Il a ensuite fait partie de l’Union soviétique après la constitution de cet Etat et, après la Seconde Guerre Mondiale, une partie de ce territoire a été rattaché à la Bessarabie roumaine pour constituer la République socialiste soviétique moldave. Mais une fois l’Union soviétique démantelée et la République de Moldova devenue indépendante, les autorités séparatistes de la région de Transnistrie, avec l’aide des unités de l’ancienne armée soviétique toujours présente sur son territoire, ont lancé une véritable guerre contre les forces de Chisinau. Ce fut un confit similaire à ceux des régions séparatistes de Géorgie et plus récemment au conflit de l’est de l’Ukraine. La Transnistrie déclare une indépendance reconnue seulement par d’autres régions séparatistes : l’Abkhazie, l’Ossétie du sud et le Haut Karabach. En effet, conformément au droit international, la Transnistrie fait partie du territoire national de la République de Moldova. Elle est pourtant ce que l’on appelle de nos jours « un conflit gelé », un territoire situé entre la Moldavie – en effet, la majorité des citoyens ont aussi des passeports moldaves, certains sont aussi citoyens roumains et donc européens – et la Russie, qui lui fournit un soutien militaire économique, financier et politique. Pourtant les dirigeants qui contrôlent de facto la région circulent librement dans l’Union Européenne et leurs affaires sont étroitement liées à la République de Moldova et à l’Europe. C’est une situation particulièrement compliquée, qui continuera de l’être à l’avenir aussi. Et c’est tout pour cette édition de notre Courrier des Auditeurs. A très bientôt !