Le féminicide, une alerte extrême
Les cas de féminicide ne cessent de se multiplier en Roumanie. La société civile tire de nouveau la sonnette d’alarme.

Daniela Budu, 19.06.2025, 11:41
Une femme par semaine est tuée en Roumanie
A deux semaines de distance seulement du dernier cas de féminicide, en Roumanie, un homme a tué sa partenaire, une femme enceinte, mère de deux enfants, le tout sous les yeux de sa famille et sur toile de fond des tentatives de la victime de sortir d’une relation toxique et violente. C’est le 26e cas depuis le début de cette année, un chiffre qui se traduit par une femme tuée par semaine en Roumanie en 2025. Cela signifie aussi que les cas de violence faite aux femmes sont insuffisamment sanctionnés et sont tolérés par ceux qui devraient en fait les protéger, tirent la sonnette d’alarme les représentants du Centre FILIA.
Les demandes de la société
Cette organisation féministe qui milite pour les droits des femmes a même organisé une nouvelle manifestation de protestation, mercredi soir, à Bucarest, devant le siège du gouvernement, demandant une nouvelle fois que les femmes roumaines soient réellement protégées. C’est leur deuxième manifestation de ce type cette année. Si la première avait réuni 5 000 personnes, cette fois-ci il y a eu un millier environ. A chaque fois, les participants ont demandé des mesures réelles pour garantir la sécurité des femmes, puisqu’à leur avis ces crimes doivent être considérés comme des urgences nationales, pas seulement comme des statistiques. Il faut appliquer la loi, quelle que soit la forme de la violence, estiment encore les manifestants. Selon eux, l’évaluation du risque doit être obligatoire pour tous les cas de violence domestique. Il faut aussi mettre en place un financement réel et adéquat pour les services destinés aux victimes et aux agresseurs. Et pas en dernier lieu, les manifestants ont demandé aux autorités de garantir la formation continue et obligatoire des policiers, procureurs, juges, professionnels de la santé et assistants sociaux dans le domaine de la violence fondée sur le genre. Il est tout aussi urgent d’avoir des données centralisées et transparentes sur les féminicides et sur tous les cas de violence domestique et fondée sur le genre, de garantir les investigations de ces cas et de solutionner les enquêtes dans un délai raisonnable, ainsi que de mettre en place des mécanismes réels de prévention. Autant de demandes urgentes et nécessaires formulées par les manifestants. Et pour cause. Dans les deux semaines écoulées entre les deux crimes mentionnés, aucune décision n’a été prise.
Le président réagit
Dans ce contexte, mercredi, le président roumain Nicuşor Dan a fait un appel aux autorités responsables, leur demandant de traiter chaque cas de violence domestique avec un maximum de sérieux. Il a aussi promis de coopérer avec le futur Exécutif pour mettre au point un paquet de mesures concrètes, à même de garantir une vraie protection des victimes et prévenir la violence fondée sur le genre. Le chef de l’Etat roumain s’est dit pleinement solidaire avec les participants à la manifestation de protestation.
Nicuşor Dan : « Il est essentiel que la voix des victimes soit entendue et que les politiques publiques soient construites en partant des réalités douloureuses auxquelles celles-ci sont confrontées tous les jours ».
Une initiative législative
A son tour, Gabriela Firea, membre de la Commission pour les droits des femmes et l’égalité de genre au sein du Parlement Européen, propose la mise en place d’urgence d’un paquet de mesures censées garantir la protection des femmes. D’ailleurs, les députées et sénatrices du Parti Social-Démocrate de Roumanie ont déjà annoncé une initiative législative visant à améliorer le cadre législatif concernant la prévention et la lutte contre les violences faites aux femmes, par l’introduction du féminicide en tant qu’infraction distincte dans le Code Pénal roumain.
La Patriarchie Roumaine réagit
Enfin, « La Patriarchie Roumaine exprime sa profonde inquiétude face à ces phénomènes qui portent une grave atteinte à la personne humaine et à l’unité des familles. Toute manifestation de la violence est incompatible avec les normes chrétiennes et toutes les formes d’abus blessent non seulement le corps, mais aussi l’âme de la personne agressée, causant des traumas difficiles à guérir sur le long terme ». Ce fut le message transmis par la Patriarchie Roumaine à l’égard de cette situation. (trad. Valentina Beleavski)