Le tonneau à glace
Ana-Maria Cononovici, 15.11.2022, 14:35
Il
nous a raconté ses débuts difficiles. Sa mère lui a rappelé qu’à l’époque de
son enfance, le marchand de glace se promenait avec son « tonneau ».
Adrian Mengheş nous raconte comment il en est venu à créer cette marque : « Nous avons connu des débuts
difficiles, car à l’époque je ne maîtrisais pas la technique de la crème glacée
en baril. Nous sommes allés de village en village écouter les récits, les
recettes, mais nous n’avons pas toujours été bien accueillis. Ceux qui
fabriquaient encore de la glace artisanale ne souhaitaient pas partager leur
recette. Nous frappions aux portes des mairies, affirmant que nous étions une
chaîne de télévision venue faire un reportage sur les traditions des glaciers
roumains. C’est comme ça que nous avons obtenu le soutien des maires et leurs
adjoints, et que nous avons fini par faire la connaissance de Ion de la Vâlcea,
qui a accepté de partager avec nous sa technique. Il était vexé que son fils
refuse de perpétuer cette tradition. Il disait « regarde, voilà un
étranger à qui je vais tout expliqué puisque toi, tu ne veux rien savoir ». »
Voilà
presque 12 ans que notre interlocuteur a commencé à faire de la glace en
tonneau, et au fil des années il a constaté une évolution des habitudes de
consommation chez les clients, surtout récemment.Adrian Mengheş nous explique : «
Les clients font de plus en plus attention à ce qu’ils consomment. Ils sont
davantage sensibilisés à la question de l’alimentation. Nous leur expliquons
systématiquement que nos glaces sont faites maison. Et qu’elles n’ont rien à
voir avec celles que l’on trouve dans les supermarchés. D’abord parce que le
processus de fabrication est différent, il s’agit d’une autre texture, d’autres
arômes. Nos glaces sont beaucoup plus denses, elles contiennent beaucoup moins
d’air que les glaces industrielles. C’est la première grosse différence.
La deuxième, c’est que nous préparons nous mêmes les matières premières qui
constituent la base de notre crème glacée, à savoir le lait, les œufs, la
crème, les jaunes d’œufs. Nous fabriquons aussi nos propres
parfums ! »
Les
commandes des clients sont livrées via une application et grâce à un véhicule
spécialement conçu pour l’entreprise. Le nombre de clients a explosé après le
confinement, lorsque le laboratoire de l’entreprise enregistrait chaque jour
entre 1 200 et 1 400 euros de commandes. Le site internet propose
près de 30 parfums de glace différents, mais les plus vendus demeurent la
vanille, le chocolat, la mangue, le caramel salé et la menthe. Adrian Mengheş
nous en dit plus : « Nous
fabriquons nos parfums à base de fruits congelés ou, à l’automne par exemple, à
base de potimarrons ou de pommes au four, avec de la cannelle. Nous les
préparons de A à Z. Nous sommes fiers de pouvoir affirmer que nous sommes de
vrais glaciers, que nous avons pris des cours et étudié l’art de la fabrication
de la crème glacée. Nous adaptons les arômes à nos goûts mais aussi à ceux des
clients lambda. Au fil des ans, nous avons testé plus d’une centaine d’arômes
différents, mais ce n’est pas toujours évident car la vanille, le chocolat, la
fraise et la framboise restent les parfums les plus demandés. Souvent l’été, la
saison des glaces, nous revenons sur des parfums plus classiques, mais nous
avons plaisir à prendre des libertés durant l’automne. »
Cet
automne, Adrian Mengheş a participé au Festival des Hommes de Mătăsari où il a
présenté une nouveauté : « J’ai participé aux trois éditions de
ce festival, mais c’est la première fois que je fais une démonstration de
fabrication de glace sur place. En général, nous apportons nos glaces déjà
prêtes à être vendues. Mais, à la demande des organisateurs, nous avons accepté
de relever le défi, et je dois admettre que le résultat a été très probant.
Nous ne nous attendions pas à vendre autant de glace en plein mois
d’octobre. »
Cette
glace artisanale se fabrique en mélangeant les ingrédients dans un récipient
cylindrique en inox, qu’il faut introduire à son tour dans le baril, autour duquel
on dispose de la glace et du sel, afin d’accélérer le processus de congélation.
Après quoi, le récipient cylindrique doit entamer une rotation effectuée
manuellement, pendant environ 4 heures. Ensuite, la glace est déposée dans un lieu sûr
soumis à des critères sanitaires stricts. Parmi les arômes les plus surprenants
proposés par le glacier, on trouve de la glace au coliva (dessert traditionnel
roumain à base de blé), à la moutarde, à la lavande ou au basilic. Nous n’avons
pas encore goûté à celle au gingembre et aux raisins, à la pomme au four et aux
biscuits, ou encore à la vanille sans sucre. Une aventure pour les papilles
gustatives les plus téméraires !
(trad :
Charlotte Fromenteaud)