Plantez un arbre à leur mémoire
En Israël, on plante des arbres en
mémoire des êtres chers qui nous ont quittés. Au Royaume-uni, les familles ont
la possibilité de payer et de demander à leur mairie de faire installer un banc
à l’endroit où aimait se rendre leur proche défunt. Récemment, un projet
similaire a été lancé par l’association « Zi de bine », intitulé
« plantez à leur mémoire ». Il s’agit du premier projet auquel Claudia
Udrescu travaille depuis le décès de son père, et c’est pour cela qu’elle a
accepté de nous parler de cette initiative :
Ana-Maria Cononovici, 10.01.2023, 02:40
En Israël, on plante des arbres en
mémoire des êtres chers qui nous ont quittés. Au Royaume-uni, les familles ont
la possibilité de payer et de demander à leur mairie de faire installer un banc
à l’endroit où aimait se rendre leur proche défunt. Récemment, un projet
similaire a été lancé par l’association « Zi de bine », intitulé
« plantez à leur mémoire ». Il s’agit du premier projet auquel Claudia
Udrescu travaille depuis le décès de son père, et c’est pour cela qu’elle a
accepté de nous parler de cette initiative :
Claudia Udrescu : « « Plantez à leur mémoire »
est né du besoin d’expriemr le deuil dans l’espace public. Comment ? Melania
Medeleanu (fondatrice du centre communautaire « Zi de bine ») a
rencontré quelqu’un qui avait perdu plusieurs proches dans un accident de la
route. Cette personne essayait de parler de ces êtres chers qu’elle ne
reverrait plus. Et la seule réponse qu’elle obtenait était « ça va
passer », « le temps guérit les blessures », « sois
forte » ou « ne pleure pas ». Alors qu’elle ne souhaitait qu’une
seule chose, pouvoir exprimer son chagrin, retenir un peu plus longtemps près
d’elle ces proches désormais disparus. Elle a pourtant continué à essayer d’en
parler, mais s’est finalement retrouvée seule face au silence. Plus personne ne
l’appelait. Puis lui est venu à l’esprit le film « Coco » et cette
idée que nous cessons d’exister le jour où meurt la dernière personne qui se
souvient de nous. Nous nous sommes donc demandés comment faire. Comment
permettre à nos défunts de continuer d’exister même après la mort ? C’est
ainsi qu’est née l’idée de notre site internet plantațiînamintire.ro, qui met
en ligne des souvenirs des personnes qui nous sont chères et qui nous ont
quittés. Certains souvenirs sont à la fois bouleversants et magnifiques, et
chaque mot pèse très lourd. Nous vous encourageons à les lire. Après le site, a
émergé l’idée de la plantation d’arbres, car l’arbre est un symbole de vie,
mais aussi de matérialité. Un arbre peut être étreint. Et notre projet consiste
à relier le récit d’un défunt à son arbre, auquel on peut avoir accès grâce à
un QR code. »
C’est ainsi qu’au début du mois de
novembre est apparu le premier parc rempli d’arbres à souvenir. Claudia Udrescu
nous raconte :« Le premier parc à souvenir de Roumanie est donc né à Lugoj, et
nous l’avons inauguré le 5 novembre. Vu du dessus, le parc a la forme du
symbole de l’infini, et se compose de 100 bouleaux qui racontent la douleur et
le chagrin, avec un gincobiloba au milieu, qui symbolise la vie. Voilà donc 100
souvenirs réunis dans un parc de 100 bouleaux, en plein cœur de la Roumanie. Le
moment de l’inauguration a été particulièrement émouvant. Nous étions entourés
de plusieurs dizaines de personnes venues déposer leur plaque avec le QR code
qui relie l’arbre au souvenir de leur défunt. Quelqu’un nous a dit « grâce
à cet arbre que j’ai planté, les jours de novembre seront toujours verts, même
si en automne les feuilles des arbres jaunissent ». Un autre a ajouté
« J’ai le cœur plus léger maintenant que le souvenir de ma mère n’est plus
prisonnier de mon âme, que ce bouleau lui donne un nouvel espace pour
exister ». Quoi de plus vivant qu’un parc dans lequel les générations
futures pourront se promener, jouer, trouver refuge à l’ombre de ces arbres
majestueux plantés à la mémoire de nos proches disparus ? »
Une démarche qui permet à la vie de continuer,
comme nous l’explique Claudia Udrescu : « Ce
parc transforme le deuil et le chagrin en vie. Les gens sont venus de Brasov,
Plopeni, Craiova, Timişoara ou encore de Bucarest. Certains sont venus juste
pour étreindre un arbre, car ils en éprouvaient le besoin. Quelqu’un nous a dit
qu’il viendrait arroser son arbre pour qu’il pousse. Il est resté là des
heures, assis sur le banc à regarder l’arbre. Beaucoup de messages ont été
échangés sur whatsapp, car beaucoup parmi ceux qui ont planté un arbre sont partis
à l’étranger. Nous vous encourageons à lire tous ces souvenirs partagés qui ont
été écris dans le chagrin mais avec amour, et que vous pouvez retrouver sur
notre site. Car croyez le bien, rien ne vous fait sentir plus vivant que
l’amour avec lequel ces souvenirs ont été rédigés, le soin avec lequel chaque
mot a été choisi pour raconter. Nous mesurons la douleur cachée derrière chacun
de ces récits, et nous vous remercions de votre confiance. Nous tenons aussi à
rappeler que ce mois de novembre est consacré à rendre hommage à tous ces êtres
chers disparus et qui restent dans nos cœurs, car nous souhaitons surtout
accompagner ces personnes dans leur deuil. Une expérience par laquelle nous
finissons tous par passer à un moment dans notre vie. »
Il ne s’agit que d’une première étape
car le projet va se poursuivre ^pour tous ceux qui éprouvent le besoin de
retrouver la sérénité. Claudia Udrescu nous en dit davantage : « Ce que nous souhaitons aujourd’hui, et
nous vous remercions de tous cœurs pour tous les messages que vous nous avez
envoyés, c’est d’étendre ce projet dans le reste du pays. Il est essentiel
que des projets similaires soient soutenus par d’autres mairies. Car nous nous
occupons de planter les arbres, mais cela nécessite de l’entretien et c’est le
rôle des mairies d’entretenir ces parcs sur le long terme, car il ne s’agit pas
de n’importe quel parc. Ici chaque arbre représente une personne, un être
proche, pour celui qui l’a planté. C’est avec beaucoup de joie et d’émotion que
nous vous annonçons que les deux prochains parcs seront inaugurés à Bucarest et
à Oradea. Les mairies soutiennent le projet et nous avons hâte que cela se
concrétise. Car tout le monde est
concerné, tout le monde a besoin d’un espace sacré, si j’ose dire, dans lequel
venir déposer son chagrin pour qu’il se repose. Merci de soutenir le projet
« Plantez en leur mémoire » en vous rendant sur notre site
« zidebine.ro », où vous trouverez toutes les modalités pour le
faire. Le plus simple reste encore d’envoyer « sms » au 8 8 4 5 pour
faire un don de 2 euros par mois ».
Aujourd’hui c’est l’automne, mais
n’oubliez pas que le deuil, lui, dure. (Trad : Charlotte Fromenteaud)