Les pèlerinages en Roumanie – la Sainte Parascève
La Sainte Parascève est devenue une figure spirituelle majeure en Roumanie, dont la brève vie d'ascèse (27 ans) a donné naissance à un culte populaire très puissant, particulièrement visible dans le pèlerinage annuel de Iași.
Andra Juganaru, 14.10.2025, 13:42
Le 14 octobre marque une des fêtes religieuses les plus importantes de Roumanie : celle de la Sainte Parascève, la patronne de la région roumaine de Moldavie (la partie est du territoire roumain). Et c’est Iasi, la ville la plus importante de cette région qui abrite les reliques de la Sainte Parascève dans sa cathédrale métropolitaine. C’est pourquoi, chaque octobre, Iasi devient un des plus grands lieux de pèlerinage de Roumanie, attirant des centaines de milliers de personnes. Cette année, avant la fête du 14 octobre, plus de 364 000 pèlerins avaient déjà vénéré les reliques la Sainte Parascève, en croire les chiffres de l’agence de presse Basilica.
Mais pourquoi la Sainte Parascève attire-t-elle autant de fidèles ? Nous essayerons de répondre dans les minutes suivantes.
Parascève est née dans la ville d’Epivates (aujourd’hui Selimpaşa, en Turquie), sur les rives de la mer de Marmara. Ses parents étaient de riches propriétaires terriens. Selon la légende, à l’âge de 10 ans, entendant l’appel de l’Evangile, elle a décidé de suivre la vie contemplative.
Alors, contre la volonté de sa famille, Parascève a commencé à donner ses vêtements aux pauvres. Pourtant, elle a été si sévèrement punie, qu’elle s’est enfuie du foyer parental à Constantinople pour y mener une vie ascétique. Elle s’est établie plus tard à Jérusalem où, selon la légende, elle a mené une vie de privations et de prière, jeûnant souvent, portant des vêtements simples, dormant sur le sol et priant sans cesse.
Elle a vécu aussi dans d’autres régions orientales, menant une vie austère et recevant des visions de la Vierge Marie. Une fois arrivée à Jérusalem, elle s’est installée dans un couvent du désert de Judée, près du Jourdain. A 25 ans, un ange lui est apparu en rêve, lui demandant de retourner dans sa patrie. Elle est revenue donc à Constantinople où elle a vécu dans l’église des Saints Apôtres du village de Kallikrateia (aujourd’hui Mimarsinan). Elle est morte à l’âge de 27 ans.
La découverte du corps de Sainte Parascève a été considérée comme miraculeuse : après qu’un marin mort a été jeté à la mer et que son corps a échoué près de Parascève, les habitants d’un village ont découvert le corps de la Sainte intact et parfumé lors de l’inhumation du marin. Un des villageois a eu ensuite un rêve qui fut interprété comme un signe divin, et alors le corps a été transféré dans une église de Kallikrateia, dans les Balkans. Des guérisons miraculeuses se sont produites suite aux des prières devant ses reliques.
Au fil du temps, ses reliques ont été transférées à plusieurs reprises. En 1238, elles ont été transférées de Kallikrateia à Veliko Tarnovo (en Bulgarie actuelle). En 1393, elles sont arrivées à Belgrade. En 1521, après la prise de Belgrade par les Ottomans, elles ont été transportées à Constantinople. En 1641, elles sont parvenues au monastère des Trois Saints Hiérarques à Iași, dans l’est de la Roumanie actuelle. En 1888, elles ont été transférées à la cathédrale métropolitaine de Iași.
Dans la tradition populaire roumaine, Sainte Parascève est vue comme une protectrice capable de guérir et de faire des miracles. Elle est parfois perçue comme une vieille femme qui punit les erreurs de la communauté afin de rétablir l’équilibre. Le culte de la Sainte Parascève a été parfois confondu avec celui d’une divinité slave connue sous les noms de Petka, Pyatnitsa ou Jiva, signifiant « vendredi ».
Après sa mort, des écrits ont été composés sur sa vie terrestre et le transfert de ses reliques. Ces biographies de saints s’inscrivent d’ailleurs dans un genre littéraire hérité des biographies anciennes.
Le plus ancien ouvrage hagiographique était celui du diacre Vasilisc (XIIe siècle). D’autres versions ont été composées par le patriarche Eftimie de Tarnovo (XIVe siècle) et le métropolite Mathias des Myres (vers 1605), qui a également composé la liturgie de la Sainte Parascève.
La première mention en roumain de la vie de la sainte, l’on retrouve dans le Livre roumain d’apprentissage du métropolite Varlaam de Moldavie, imprimé à Iași en 1643. Puis, la vie de la sainte a été résumée par le métropolite Dosoftei dans son œuvre La vie et les actes des saints (1682-1686).
Somme toute, le culte de la Sainte Parascève a évolué grâce à plusieurs événements considérés comme miraculeux. Par exemple, en 1946-1947, une sécheresse sévère a frappé la région de Moldavie, aggravant la pauvreté d’après la Seconde Guerre mondiale. Le patriarche Justinien Marina a alors autorisé la première procession publique des reliques de la Sainte Parascève, conservées depuis à Iași. La châsse contenant les reliques a traversé les villages désertifiés par la sécheresse. Les offrandes collectées lors de cette procession ont été distribuées aux orphelins, veuves, invalides, cantines scolaires, et utilisées pour aider les églises en construction et les monastères pour nourrir les moines âgés ou faibles.
La Sainte Parascève est devenue une figure spirituelle majeure en Roumanie, dont la brève vie d’ascèse (27 ans) a donné naissance à un culte populaire très puissant, particulièrement visible dans le pèlerinage annuel de Iași.