« Cu alte cuvinte », une association pluri-récompensée
L’Association « Cu Alte Cuvinte » se propose de promouvoir la diversité sur le marché du livre pour enfants, à travers la création d’espaces où les enfants et les adultes abordent ouvertement des sujets concernant la culture et l’histoire des Roms, le handicap, la neuro-diversité, les familles diverses, les stéréotypes de genre et les défis sociaux-économiques.
Corina Sabău, 08.11.2025, 10:30
Le projet « Bare Rroma », monté par l’Association « Cu Alte Cuvinte / En d’autres mots », a été récompensé cette année du prix de l’Éducation, au Gala de Radio Roumanie Culture. Fondée en 2016 par Gabriela Nenciu et Cris Pîrvu, l’Association « Cu Alte Cuvinte » se propose de promouvoir la diversité sur le marché du livre pour enfants, à travers la création d’espaces où les enfants et les adultes abordent ouvertement des sujets concernant la culture et l’histoire des Roms, le handicap, la neuro-diversité, les familles diverses, les stéréotypes de genre et les défis sociaux-économiques.
Des livres pour les enfants roms
Un premier pas dans cette direction a été la publication du premier livre pour adolescents avec des personnages d’ethnie rom, « Povestea kendamei pierdute / L’histoire du kendama perdu », prix de l’Union des écrivains de Roumanie 2018. Il y a eu ensuite « Inelul cu cap de cal / La Bague tête de cheval », première histoire illustrée des Roms pour les enfants, écrite par deux autrices elles-mêmes d’ethnie rom, et « Bare Rroma » (un titre en langue romani qui se traduit par « des gens importants »), une première série de livres illustrés qui racontent la vie de personnalités roms. Dora Cerin, coordonnatrice de projets, a parlé du début et de l’évolution de l’association, qui a réussi en seulement huit ans à faire changer les mentalités et à faciliter la parution de nombreux livres illustrés.
« C’est avant tout un très beau processus. Il s’agit de dix-neuf livres illustrés dont treize ont des personnages roms. La plupart sont des livres illustrés pour enfants, notamment des enfants âgés de plus de cinq ans. Mais nous avons aussi un livre pour adolescents, ce qui nous a permis de toucher ainsi les collégiens et leurs enseignants. Cependant, je vous le disais, la majorité des livres est pensée pour les élèves de la maternelle et du cycle primaire. Dans un premier temps, l’idée a été de travailler avec des écrivains consacrés, qui entraient en contact avec un groupe d’enfants et s’inspiraient de leurs histoires et aspirations personnelles, créant ainsi un conte inspiré de la réalité. À partir de 2022, nous avons changé d’approche, car nous avons voulu aussi créer une plateforme pour soutenir les jeunes auteurs roms, y compris des débutants dans le domaine de l’écriture. Le projet « Bare Rroma », qui a déjà reçu plusieurs prix, est en effet allé à la rencontre d’une majorité d’écrivains débutants. Concernant la sélection, l’appel est ouvert. Lors du dernier appel à candidatures, par exemple, nous avons retenu huit futurs écrivains parmi les jeunes candidats roms qui y ont répondu. »
Le projet « Bare Rroma »
Le projet « Bare Rroma », qui est à sa deuxième édition, propose quatre récits avec des héros et des héroïnes ethniques roms, des modèles de vie pour nous tous. Si la première édition a mis en lumière quatre récits sur deux activistes, un acteur et un musicien, les ouvrages de la deuxième édition parlent d’une soprano, d’une actrice, d’un peintre et d’un sociologue. Quatre livres qui nous provoquent à regarder au-delà des stéréotypes sur les Roms et à découvrir des individus-modèles de persévérance, de talent et de générosité. Les huit jeunes auteurs ont choisi eux-mêmes les héros et les héroïnes de leurs livres, sous la coordination de l’écrivaine Iulia Iordan et de la journaliste Delia Marinescu. Évidemment, le projet est également né du désir d’intégration des enfants d’ethnie rom. Sept enseignants sur dix affirment que leurs élèves roms ne déclarent pas leur identité ethnique par peur de se voir discriminés et aussi par honte, indique une étude en ligne réalisée par l’Association « Cu Alte Cuvinte », avec le soutien de plusieurs ONG actives dans les communautés défavorisées. Dora Cerin, coordonnatrice de projets dans le cadre de l’association, ajoute d’autres détails sur le projet « Bare Roma »
« C’est le projet qui nous tient le plus à cœur. Il est, en quelque sorte, différent de nos projets antérieurs. L’idée de départ a appartenu aux enseignants, plus précisément à une enseignante qui a exposé le problème du manque de matériels didactiques à employer pour présenter aux enfants des modèles de la communauté rom. L’idée a été très bien accueillie par les enseignants et par le grand public. Certes, il y a eu aussi le fait que notre démarche est allée au-delà des carcans d’un projet éditorial qui se serait contenté de raconter tout simplement une histoire. Le très bon accueil est aussi dû à l’implication d’auteurs roms. Autre élément important – les livres en question reposent sur des interviews réalisées avec les personnalités dont ils parlent. Des liens se sont créés et je peux vous dire que ces rencontres entre les auteurs roms et leurs héros ont été très émouvantes ; je voudrais insister sur le fait que l’association n’est jamais intervenue dans la sélection des personnages emblématiques présentés dans les livres. Les jeunes inscrits dans le projet et leurs arguments en ont été les seuls responsables. Les activités en classe ont été plus intéressantes car les enfants connaissaient déjà les héros des livres et les regardaient comme des modèles de vie. »
Livres et identité culturelle
Si les livres soignés et publiés par l’équipe « Cu Alte Cuvinte » allaient surtout dans les établissements scolaires et les bibliothèques, l’association a réussi à faire entrer dans les librairies de Roumanie le premier livre illustré pour les enfants âgés de plus de quatre ans, écrit par un auteur rom, « Bariș. De vorbă cu ploaia / Bariș. Causer avec la pluie ». Écrit par l’enseignant et raconteur Alexandru Zamfir et par l’illustratrice passionnée de l’art pour les enfants Daniela Olaru, ce livre mixe parfaitement le récit et l’illustration, encourageant les petits à poser des questions sur l’identité culturelle. (Trad. Ileana Ţăroi)