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Le communisme, entre condamnation et nostalgie

Le gouvernement de Bucarest et l’Institut pour l’Investigation des Crimes du Communisme et la Mémoire de l’Exil Roumain préparent un plan visant à accroître le niveau de sensibilisation du public aux crimes du communisme en Roumanie.

Foto: Alexandru Dolea
Foto: Alexandru Dolea

, 24.12.2025, 10:18

Une révolution sanglante…

 

Pour les Roumains qui ont vécu la révolution anticommuniste de 1989, décembre n’est pas seulement le mois des fêtes de fin d’année, mais aussi celui où ils se souviennent des événements historiques qu’ils ont vécus.

Après plus de 40 ans de régime communiste, entre le 16 et le 25 décembre 1989, la Roumanie est devenue le dernier pays du bloc totalitaire d’Europe de l’Est où le régime dirigé d’une main de fer par Nicolae et Elena Ceaușescu s’est effondré dans le bruit des balles et l’odeur de la poudre à canon. Les Roumains ont dit « non » à la dictature, à la collectivisation agricole, à l’austérité sévère, à la pénurie, au culte de la personnalité ou au contrôle omniprésent de la police politique de l’époque. Ce fut la révolution anticommuniste la plus sanglante d’Europe de l’Est, avec plus d’un millier de morts et 4 000 blessés. Elle a culminé, rappelons-le, avec la fuite du couple dictatorial, sa capture, sa condamnation et son exécution par fusillade le jour de Noël.

 

… à l’héritage contesté

 

36 ans plus tard, un sondage réalisé par INSCOP Research en partenariat avec l’Institut pour l’investigation des crimes du communisme et la mémoire de l’exil roumain (IICCMER) révèle un fossé immense entre la réalité historique du régime communiste et la perception actuelle du public. Plus précisément, une grande partie des Roumains d’aujourd’hui idéalisent cette période, malgré les faits historiques. Près de 50 % des participants au sondage estiment qu’avant 1989, la vie était meilleure en Roumanie. 66 % des Roumains considèrent que Nicolae Ceaușescu était un bon dirigeant, bien que le régime ait commis des actes graves et généré des problèmes sociaux majeurs. Ce phénomène est particulièrement marqué parmi les groupes vulnérables, mécontents sur le plan économique et social, dans un contexte d’absence de politiques publiques efficaces et de vide éducatif en matière d’histoire, toujours selon cette étude.

 

 

Pour reconnecter la société à son histoire récente et aux valeurs de liberté et de démocratie, il faut avant tout défendre la mémoire de la révolution anticommuniste de 1989, un évènement dont certains acteurs tentent de diminuer la portée.

 

Oublier ce qui s’est passé à l’époque serait un crime moral, a déclaré Emil Constantinescu, président de la Roumanie entre 1996 et 2000, lors du symposium « La chute du mur de Berlin, répercussions et influences en Europe de l’Est », organisé récemment dans la ville martyre de Timișoara.

 

 

Emil Constantinescu met en perspective la révolution et l’état actuel de la société:

« Nous, peut-être les derniers survivants de cette époque, sommes appelés à répondre à une question fondamentale : comment a-t-il été possible que les idéaux universels de vérité et de justice, fondements pour lesquels des foules immenses se sont battues au prix de leur vie, aient été remplacés par la société actuelle, une société du mensonge et des intérêts ? La réponse ne peut être obtenue qu’en reconsidérant l’histoire récente de l’Europe, née au moment de la rupture de l’histoire mondiale en 1989-1990. J’affirme avec force que nier, falsifier, minimiser et, finalement, oublier l’importance historique de la révolution de décembre 1989 constitue un immense crime moral ».

 

Le poids d’une démocratisation difficile

 

L’ancien chef de l’État a poursuivi sur les vulnérabilités de la démocratie actuelle qui alimentent la nostalgie de l’ère totalitaire :

« Après l’intégration dans l’Union européenne, plusieurs involutions inattendues et désagréables se sont produites, qui ont faussé la liberté obtenue en décembre : l’émergence d’une tendance vers des régimes politiques autoritaires ou populistes, le remplacement de l’économie réelle par une économie spéculative, l’aggravation de la manipulation par les médias et les réseaux sociaux, l’instauration d’une société du mensonge… Trente-six ans après la chute du mur de Berlin, symbole de la division entre l’Est et l’Ouest, nous sommes contraints de constater que la démocratie est fragile et vulnérable face à l’agression de la Russie en Ukraine, qui érige le recours à la force contre la force du droit, garante de la liberté ».

 

Et l’actuel président du pays, Nicușor Dan, pense que : « la principale raison pour laquelle de plus en plus de Roumains idéalisent le communisme est la profonde déception envers la classe politique des trois dernières décennies. La corruption, le manque de transparence, les promesses non tenues et le sentiment d’injustice ont affaibli la confiance des gens dans le présent et dans l’avenir ».

La fausse image de la période communiste est également entretenue par des campagnes de désinformation qui tentent de saper les valeurs démocratiques et de présenter un passé embellit, tout en cachant la vérité sur la répression, la peur, la famine et le manque de liberté. C’est pourquoi, selon le président Nicușor Dan : « pour préserver la démocratie et lui donner tout son sens, nous devons lutter fermement contre la désinformation, redonner confiance aux citoyens grâce à des politiques publiques justes et construire une société où tous les citoyens puissent bénéficier de la justice, de l’équité et d’un développement réel ».

 

Connaître son histoire

 

Dennis Deletant, professeur britannique spécialiste de l’histoire de la Roumanie, affirme que pour que les jeunes d’aujourd’hui, qui n’ont pas vécu les horreurs du communisme, puissent connaître le passé tel qu’il était réellement, il faudrait ouvrir un musée du Communisme.

Dennis Deletant : « Il faut absolument que ce soit un musée, car beaucoup de gens, surtout ceux de ma génération, savent ce que le communisme a signifié pour la Roumanie et comment il continue d’influencer la mentalité de nombreuses personnes. Je me rends souvent dans les villages roumains et je discute avec les gens qui ont leurs propres revendications, en particulier les retraités, et je suis frappé par le fait qu’ils ne connaissent que des bribes de l’histoire du communisme. Ils pensent bien sûr à la situation alimentaire et à la difficulté de vivre à cette époque. Mais ils aiment le fait qu’il y avait une certitude : même si la situation était mauvaise, l’avenir était assuré et, en discutant avec eux, j’ai remarqué que beaucoup de gens sont dérangés par cette incertitude quant à l’avenir ».

 

L’éducation étant primordiale, un plan national visant à sensibiliser le public aux crimes du communisme en Roumanie sera mis en œuvre l’année prochaine. Ce document, en cours d’élaboration au niveau du cabinet du Premier ministre, vise notamment à former de manière adéquate les professeurs d’histoire afin qu’ils transmettent correctement les informations relatives à la période qui a précédé la révolution de décembre 1989.

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