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La lutte contre la traite des êtres humains

63 % des victimes recensées au sein de l’UE sont des femmes ou des jeunes filles, avec une concentration particulièrement élevée au Luxembourg, en Estonie et en Autriche

Foto: Eric Ward / unsplash.com
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, 09.04.2025, 11:30

Une étude publiée en début d’année par la Commission européenne dresse un constat alarmant : les ressortissants roumains constituent la majorité des victimes de traite des êtres humains identifiées dans l’Union européenne. Ils sont suivis, dans ce sinistre palmarès, par les Français, les Hongrois, les Bulgares et les Allemands. L’exploitation sexuelle demeure la principale finalité de ces réseaux criminels, selon les données recueillies. Un rapport complémentaire d’Eurostat vient renforcer cette analyse : 63 % des victimes recensées au sein de l’UE sont des femmes ou des jeunes filles, avec une concentration particulièrement élevée au Luxembourg, en Estonie et en Autriche — les trois pays ayant enregistré les taux les plus importants.

Ștefan Coman, responsable du plaidoyer pour l’ONG International Justice Mission, rappelle toutefois que ces chiffres doivent être interprétés avec prudence. Un nombre élevé de victimes recensées dans un pays ne signifie pas nécessairement que le phénomène y est plus répandu, mais peut aussi indiquer une capacité plus efficace à identifier et prendre en charge les victimes, précise-t-il. Ecoutons-le :

« La Roumanie figure traditionnellement en tête des pays de l’Union européenne en ce qui concerne le nombre de victimes identifiées de la traite des êtres humains. Ce constat s’explique aussi par un autre indicateur : notre pays enregistre également le plus grand nombre de condamnations pour traite, ce qui témoigne de notre capacité à détecter les victimes, à poursuivre les trafiquants et à transmettre des données précises. À titre de comparaison, la France est le pays dont les chiffres se rapprochent le plus de ceux de la Roumanie, tant en matière de condamnations que de victimes déclarées. Cette corrélation illustre un fait essentiel : les pays qui cherchent activement à repérer la traite la trouvent. À l’inverse, le faible nombre de victimes signalées dans certains États ne reflète pas l’absence de trafic, mais plutôt un déficit d’identification. »

Un fléau qui cible les plus vulnérables

Ștefan Coman soutient par ailleurs que si la Roumanie reste performante en termes de condamnation, la moyenne des peines prononcées au cours des dernières années reste quant à elle relativement faible :

 

 « Il est vrai que de nombreuses condamnations ont été prononcées, mais les peines restent relativement faibles. En 2018, la durée moyenne d’incarcération oscillait entre trois et trois ans et demi. Avec un plafond pénal peu dissuasif, une part importante des peines a été assortie d’un sursis. En 2020-2021, environ 20 % des personnes condamnées pour traite des êtres humains n’ont ainsi pas effectué un seul jour de prison. Autrement dit, un trafiquant sur cinq échappe à la détention, ce qui lui laisse la possibilité de poursuivre ses activités illicites, avec pour seule leçon apprise celle de mieux dissimuler ses actes. »

 

Le rapport de l’Agence nationale roumaine contre la traite des êtres humains a identifié 500 victimes en 2022, représentant des ressortissants roumains victimes de trafic à l’intérieur du pays et à l’étranger. En 2004, ce chiffre était de 1960. Ștefan Coman décrit les situations de vulnérabilité qui rendent une personne plus susceptible d’être victime de ce fléau:

 

« Toute forme de fragilité peut devenir une porte d’entrée vers la traite des êtres humains. Une personne en situation de précarité économique, en difficulté d’insertion sur le marché du travail, peut aisément être attirée par la promesse d’un emploi bien rémunéré, pour se retrouver piégée dans un environnement dangereux et exploitée. Une vulnérabilité liée à l’alcool ou à la santé mentale constitue également un facteur de risque. Mais c’est sans doute dans le domaine de l’exploitation sexuelle que ce lien est le plus évident : les victimes de violences sexuelles, déjà marquées par un traumatisme, deviennent bien plus susceptibles d’être ciblées par les trafiquants. Leur vulnérabilité émotionnelle en fait des proies particulièrement exposées. »

 

Ștefan Coman affirme que la plupart des travailleurs et travailleuses du sexe, et victimes de trafic, ont été abusé dans leur enfance :

 

« Lorsqu’une personne reçoit le message qu’elle n’a aucune valeur intrinsèque, et que la seule valeur qui lui est attribuée réside dans sa sexualité, elle devient particulièrement vulnérable à l’exploitation. Cette perception la pousse souvent vers la prostitution, un domaine où de nombreuses victimes de trafic sont recrutées par d’autres individus déjà impliqués dans ce milieu. »

 

L’appel à une réponse internationale

Le programme de la Mission internationale de justice de l’Union européenne se concentre sur la lutte contre la traite transfrontalière, un phénomène complexe accentué par les vulnérabilités des législations nationales. Les experts de l’organisation ont identifié ces failles légales comme un obstacle majeur à l’efficacité des enquêtes. Actuellement, la mission est active en Roumanie, en Bulgarie et en Pologne, et dispose de rapporteurs au Royaume-Uni, en Allemagne et aux Pays-Bas. Dans un souci d’élargir son action, elle prévoit de renforcer sa présence en Hongrie, en France, en Italie et en Espagne. Ștefan Coman poursuit :

 

« Nous devons être présents à la fois dans les principaux pays d’origine et dans les pays de destination afin de renforcer et démontrer l’efficacité du système de lutte contre la traite transfrontalière. Les trafiquants, eux, n’hésitent pas à franchir plusieurs frontières en une seule journée. Ils peuvent ainsi passer par la Hongrie, la Slovaquie, la République tchèque, la Pologne, et finir leur trajet en Allemagne, selon leur itinéraire. Mais pour que la police ou les procureurs puissent enquêter efficacement, une coopération internationale est indispensable, en fonction de la manière dont la victime a été exploitée. Cela implique non seulement une coordination entre différentes unités, mais aussi la gestion des obstacles législatifs, car chaque pays dispose de législations et de priorités différentes. Les trafiquants sont bien conscients de ces failles : 76 % des plus grandes organisations criminelles opèrent sur plusieurs territoires, tirant parti des différences dans les systèmes judiciaires pour échapper à la détection. Pour que la traite des êtres humains diminue, il est essentiel que nous concentrions nos efforts sur la traque de ces réseaux criminels, tant que nous en avons la possibilité. »

 

La Mission internationale de la justice repose sur la théorie du changement selon laquelle une réponse cohérente et soutenue en matière d’application de la loi entraîne, sur le long terme, une diminution de la criminalité. L’ONG affirme qu’après avoir mené neuf programmes dans divers pays, les résultats sont probants, avec une réduction de la criminalité de 50 à 86 % dans les zones concernées. Selon Ștefan Coman, « Les personnes vulnérables existeront toujours, et réduire cette vulnérabilité prend du temps. En attendant, les trafiquants continueront d’exploiter ces individus. » Il précise : « Certaines personnes vulnérables sont exploitées, d’autres ne le sont pas. Ce qui distingue les deux, c’est la présence du trafiquant. »

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