Le Palais Stirbey
Situé à 20 km au Nord de Bucarest, à proximité de Buftea, chef-lieu du comté d’Ilfov, le domaine Ştirbey est devenu un lieu de détente très apprécié ces dernières années. L’histoire du palais et du domaine est pleine d’événements spectaculaires.
Christine Leșcu, 01.02.2013, 14:44
Corina Toma, directrice des relations publiques au Palais Ştirbey de Buftea, résume l’histoire de cet endroit: « La construction du palais a été entamée par le prince régnant Barbu Ştirbey, voïvode de Valachie, en 1855, et a été finalisée en 1863. En 1916, il devient le refuge de guerre de la reine Marie, épouse du roi Ferdinand Ier, et de ses enfants. Durant la première guerre mondiale, en 1917, le palais est réquisitionné par l’armée allemande, qui avait partiellement occupé le royaume de Roumanie. Un an plus tard, c’est là, dans une salle du rez-de-chaussée, qu’a été négociée le traité de paix de Buftea, également appelée la paix de la honte, et signé le 5/18 mars 1918, par lequel la Roumanie perdait la Dobroudja et les versants des Carpates. La période la plus florissante de l’histoire de ce palais a été celle du Prince blanc, comme on appelait Barbu Alexandru Ştirbey. Homme politique très important, président du Conseil des ministres, nommé ministre par intérim aux Finances et aux Affaires étrangères, membre d’honneur de l’Académie roumaine, il a également été administrateur des Domaines de la couronne, président des conseils d’administration de plusieurs grandes banques, sociétés et entreprises. Barbu Ştirbey était le possesseur d’une fortune fabuleuse, parmi les plus grandes de Roumanie. Il a créé, près du parc du Palais, une fabrique de conserves, une pépinière de vigne américaine, une crémerie et un moulin. En 1902, une fabrique de coton médical et de pansements allait compléter ce patrimoine. Il est le premier à avoir introduit la culture du coton et du riz en Valachie. »
Le surnom de Prince blanc, il le tenait de la reine Marie lorsqu’elle n’était que princesse héritière. La future reine l’a connu en 1907 et l’a appelé ainsi à cause de sa tenue typiquement britannique, son élégance, sa distinction et sa discrétion. La relation proche entre la reine et le neveu du prince régnant Barbu Ştirbey a suscité de nombreuses anecdotes et commentaires au long des années. La reine venait fréquemment en visite à Buftea, elle y passait parfois la nuit, et était, semble-t-il, amie avec Nadejda, l’épouse du prince Barbu Ştirbey. La reine Marie aimait beaucoup le domaine Ştirbey et on lui doit de magnifiques descriptions de cet endroit.
Corina Toma nous parle du palais au présent: « Le Palais Ştirbey est un des exemples d’architecture romantique de Roumanie les plus éloquents. La résidence de la famille Ştirbey est au centre du domaine, entourée d’un parc aux arbres séculaires. Les influences gothiques sont visibles aussi — si elles sont présentes à l’extérieur, à l’intérieur elles sont très nuancées, avec des accents décoratifs. Au rez-de-chaussée, dans le salon central, on peut voir des fenêtres et des portes aux cadres d’origine en chêne massif, aux décorations gothiques, aux poutres en bois peint, avec une cheminée en marbre de Carrare, et aussi des murs à lambris en bois et à l’ornementation classique. »
Sur le domaine on peut admirer la Chapelle de la Trinité, où se trouve le caveau de la famille Ştirbey. Construite à la fin du XIXe, en style éclectique, l’église est peinte à l’intérieur par Gheorghe Tătărăscu, un peintre roumain renommé. Après l’installation du régime communiste, une partie du domaine a figuré au patrimoine des Studios de cinéma de Buftea, et le palais proprement-dit est devenu établissement de protocole du régime communiste. Sa première restauration remonte à 1959. Avant la première Guerre mondiale et dans l’entre-deux-guerres, le Palais Ştirbey avait accueilli des écrivains importants, tels Ioan Slavici et Vasile Alecsandri, et des hommes politiques comme Titu Maiorescu et Petre Carp ; après 1948, les célébrités ont continué à visiter le domaine.
Corina Toma:« En 1959, Nikita Khrouchtchev y a été logé. Il avait été invité par Gheorghe Gheorghiu-Dej et c’est alors que la décision de retrait des troupes soviétiques de Roumanie a été prise. L’écrivain Mihail Sadoveanu aimait y venir pour aller à la pêche. Nicolae Ceauşescu n’a pas été un admirateur du palais, il n’est jamais venu passer la nuit ici. Pourtant, on avait construit sur le domaine Ştirbey une ferme qui fournissait les légumes pour les repas du couple Ceausescu. »
Après 1990, le domaine est passé sous la tutelle du ministère de la Culture, puis à la Régie d’administration du patrimoine du protocole de l’Etat. En 2007, une compagnie privée l’a racheté aux héritiers et maintenant il est ouvert comme restaurant et complexe touristique. Celui-ci s’étend sur 24 ha, comprenant le palais proprement-dit, la Chapelle de la Trinité, la grande salle d’événements, dite de la Reine Marie, le Pavillon du Prince Ştirbey, le Pavillon d’été Princesse Nadejda, une pelouse pouvant accueillir jusqu’à 15.000 personnes, la tour d’eau bâtie en 1920 d’après les plans du célèbre ingénieur Anghel Saligny et un lac artificiel… (trad.: Ligia Mihaiescu)