Praid sous haute surveillance : incertitude autour des mines de sel
Huit experts internationaux travaillent aux côtés de spécialistes roumains dans les mines de sel Praid, dans le centre de la Roumanie, où les inondations continuent de provoquer une situation dramatique.
Corina Cristea, 06.06.2025, 12:33
La commune de Praid, dans le département de Harghita dans le centre de la Roumanie, fait face à une situation critique depuis que le ruisseau Corund est sorti de son lit, provoquant l’inondation des célèbres mines de sel souterraines. Les autorités, en alerte maximale, ont déployé des moyens techniques et humains importants pour éviter une catastrophe écologique et économique majeure, tout en tentant de stabiliser une zone minière fragilisée.
Une mine de sel sous menace d’effondrement
Depuis le 6 mai, la mine de Praid est fermée en raison des infiltrations massives d’eau causées par des pluies diluviennes. Environ 4 millions de mètres cubes d’eau se sont infiltrés dans les galeries, mettant à mal l’intégrité du plancher de l’ancienne mine. Le risque d’effondrement n’est pas écarté, bien que les autorités assurent que l’élargissement des cratères existants ne menace pas pour l’instant les infrastructures environnantes. Aucune nouvelle cavité n’a été détectée. Trois stations sismiques ont été installées autour de la mine pour surveiller en temps réel la stabilité de la zone, tandis qu’un plan de déviation définitif du cours du ruisseau Corund est en cours d’exécution. Ce projet, crucial pour la préservation des mines de sel, doit être achevé d’ici au 1er juillet. L’eau accumulée sera progressivement drainée vers un lac salé artificiel afin de soulager la pression sur la structure minière. En parallèle, les conséquences sur la population locale sont déjà tangibles. Quelque 50 000 habitants vivant en aval sont privés d’eau potable en raison de taux de chlorure anormalement élevés dans le Corund et la Târnava Mică. Bien que la salinité ne semble pas s’aggraver, les autorités continueront à effectuer deux contrôles par jour tant que l’état d’alerte restera en vigueur.
Alerte européenne : intervention technique et expertise internationale
Face à la complexité de la situation, la Roumanie a activé le mécanisme de protection civile de l’Union européenne, sollicitant l’aide d’experts en géologie, mécanique des roches et exploitation minière. Une équipe pluridisciplinaire, composée de spécialistes espagnols, allemands, néerlandais et hongrois, a été déployée sur place pour soutenir les autorités roumaines. Accompagnée d’un officier de liaison du Centre de coordination de la réaction d’urgence de l’UE (ERCC), cette mission d’une semaine vise à établir une évaluation précise des risques et à concevoir une feuille de route pour la remise en état des installations. Les enjeux sont d’autant plus importants que la zone habitée située directement au-dessus de la mine pourrait être menacée si la situation se détériorait.
Un poumon économique asphyxié par la crise
Au-delà des risques environnementaux, l’arrêt prolongé, voire permanent, de la mine de sel de Praid aurait des répercussions économiques sévères pour la région. Véritable moteur touristique, le site a attiré l’an dernier quelque 600 000 visiteurs, soit une moyenne de 1 600 personnes par jour. Chaque journée de fermeture entraîne une perte estimée à 90 000 lei (environ 18 000 euros), uniquement liée au tourisme. Avec ses vertus thérapeutiques reconnues et ses galeries spectaculaires, les mines de sel de Praid représentent bien plus qu’un simple site touristique : elles incarnent un symbole identitaire et une source essentielle de revenus pour la région. La situation à Praid illustre la fragilité des équilibres entre exploitation du sous-sol, aléas climatiques et pressions anthropiques. Alors que les autorités s’efforcent de contenir les effets immédiats de la catastrophe, les défis de la réhabilitation, de la prévention et de la relance économique s’annoncent considérables. Les semaines à venir seront déterminantes pour sceller le sort d’un des plus importants sites salins d’Europe centrale.