Michel Beine (Belgique) – Les hélicoptères en Roumanie
Quels sont les modèles d'hélicos utilisés ? Existe-t-il un fabricant en Roumanie ? Dans quelles circonstances les hélicos sont utilisés ? Des crashs se sont-ils produits ces 20 dernières années en Roumanie? Quelles sont les options de loisirs réservées?
Alex Diaconescu, 08.09.2023, 16:33
« Les hélicoptères en Roumanie. Quels sont les modèles d’hélicos utilisés ? Existe-t-il un fabricant en Roumanie ? Dans quelles circonstances les hélicos sont utilisés ? (surveillance des foules : concerts, sports) Des crashs se sont-ils produits ces 20 dernières années en Roumanie ? Hélicos et les loisirs. Tourisme à la découverte d’un site. Baptêmes de l’air, meetings aériens. Quelles sont les options de loisirs réservées au tourisme. »
Eh bien, M Beine sachez que l’hélicoptère est une présence de longue date dans les médias roumains. Ce qui ont vécu à l’époque communiste se souviennent probablement des journaux télévisés qui illustraient le dictateur communiste Nicolae Ceausescu qui descendait d’un hélico pour inspecter les champs de blé ou de maïs. Et ce fut également le départ de l’hélico qui transportait le couple présidentiel Nicolae et Elena Ceausescu du toit du Comité central du PCR durant la révolution de décembre 1989 qui est devenu l’image emblématique de la chute du communisme en Roumanie. De nos jours, le bruit des hélicos est présent à Bucarest est dans d’autres grandes villes, comme c’est le cas de toute grande ville européenne. Et dans la quasi-totalité des cas il s’agit d’appareils modernes Airbus hélicoptères appartenant au ministère de l’Intérieur et utilisés par la police ou pour des missions de transport médical.
Mais sachez aussi que la Roumanie a également produit des hélicoptères, dont certains sont utilisés de nos jours encore. Ils sont également le fruit d’une coopération franco-roumaine datant d’il y a une bonne cinquantaine d’années. Vers la fin des années 1960 et le début des années 1970, la Roumanie essayait de mettre sur pied sa propre industrie militaire afin de réduire, voire éliminer, sa dépendance à l’Union Soviétique. Bucarest cherchait des partenaires industriels étrangers et notamment occidentaux pour pouvoir construire son propre matériel militaire. Dans le domaine de la production d’hélicoptères c’est la France et notamment la société Sud Aviation, transformée ensuite en Aérospatiale, qui allait collaborer avec la Roumanie. Le site de production en Roumanie a été érigé à Brasov, dans le centre du pays, une ville qui possédait déjà une riche histoire dans le domaine aéronautique. Le premier hélicoptère à sortir des portes des usines aéronautiques de Brasov fut le IAR 316, une licence du fameux hélicoptère léger Sud Aviation 316 Alouette III. En Roumanie 250 unités furent construites entre 1971 et 1987 dont la moitié destinée à l’armée roumaine. Les autres furent exportés vers des pays tels le Pakistan, l’Angola et la Guinée. Certains appareils ont été même modifiés pour pourvoir lancer des roquettes et des missiles antichar. Le grand frère de l’Alouette roumaine fut le IAR 330 Puma, une copie conforme du SA 330, un hélicoptère de transport moyen civil et militaire, conçu par Sud-Aviation et développé par Aérospatiale dans les années 1960. Le Puma est un des hélicoptères les plus répandus au monde, étant exporté dans une quarantaine de pays et produit, outre la France, en Angleterre, en Afrique du Sud, en Roumanie et même aux Philippines. A compter de 1974 et jusqu’à 1989, les usines aéronautiques de Brasov ont produit environ 160 hélicoptères Puma, dont 112 destinés aux forces aériennes roumaines, les autres ayant été exportés au Pakistan, en Côte d’Ivoire, aux Emirats Arabes Unis, au Soudan et en Equateur. Certains aéronefs étaient munis de flotteurs gonflables afin de remplir des missions aéronavales et la marine roumaine en utilise trois. Ces appareils de conception française mais produits en grande partie en Roumanie ont remplacé les appareils d’origine soviétique pour constituer la colonne vertébrale des ailes tournantes de l’Aviation militaire roumaine. Après 1989, la modernisation de l’armée roumaine a atteint aussi le parc d’hélicoptères militaires. Alors que la vaste majorité des Alouettes a été retirée du service actif, les Puma ont été soumis à un ample programme de modernisation appelé SOCAT (Système Optoélectronique de renseignements et lutte antichar). Les appareils furent dotés de systèmes électroniques de renseignements et de navigation performants et d’armement moderne. Notons en fait la capacité de lancer le missile antichar israélien Spike ainsi que la présence d’une tourelle armée d’un canon de 20 mm. Hormis les missions d’attaque, les Puma roumains peuvent remplir aussi des missions de recherche et sauvetage, d’évacuation médicale ainsi que des missions aéronavales.
A l’heure actuelle plusieurs dizaines de Pumas et quelques Alouettes seulement sont encore opérationnels au sein des Forces aériennes, de la Marine et du Service de renseignements roumains. Ces 30 dernières années, c’est uniquement le ministère de l’Intérieur qui a réussi à acheter de nouveaux hélicoptères : dont les H 135 utilisés par la police et par les services de premiers secours et des Sikorsky Blackhawk construits en Pologne, mais qui n’ont pas encore été livrés. La marine roumaine compte s’enrichir de deux hélicos Airbus H215M optimisés pour la lutte anti-sous-marine. Pour le reste, même si la société Airbus hélicoptères est bel et bien implantée à Brasov et propose depuis plusieurs années déjà de démarrer la production d’hélicoptères pour l’armée roumaine, comme un premier pas vers la production pour le marché international, les responsables de Bucarest hésitent toujours à faire passer une commande ferme.
Côté accidents et incidents, on ne saurait mentionner les crashs d’hélicoptères de l’armée lors de différentes missions, dont une déroulée juste après le début de l’invasion russe en Ukraine. Dans le contexte de conditions météorologiques particulièrement difficiles, avec de la giboulée, du vent et des chutes de neige, un avion de chasse Mig 21 s’est écrasé dans la région de Dobroudja, près de la côte roumaine. L’IAR 330 Puma envoyé à la rescousse s’est également écrasé, tuant les sept militaires à bord. C’était une mission particulièrement difficile, vous l’imaginez. Je mentionnerais aussi que l’été précédent, en 2021, un hélicoptère Blackhawk des Forces aériennes américaines s’est posé d’urgence sur un boulevard bucarestois durant les préparatifs en vue d’un défilé aérien à l’occasion de la fête de l’aviation roumaine il y a quelques années. Ce fut une panne mécanique qui a obligé l’équipage à atterrir parmi le trafic de la Capitale roumaine. Vous pouvez chercher les images sur Youtube, c’est vraiment impressionnant.
Autrement, côté aviation civile, il existe des sociétés de tourisme qui proposent des tours en hélicoptère au-dessus du la côte roumaine de la mer Noire ou du delta du Danube ou encore au-dessus de la Valée de la Prahova (en montagne), soit les destinations touristiques phare de la Roumanie. Ceci dit, M Michel Beine, j’espère avoir répondu à vos questions concernant les hélicoptères en Roumanie. Pour davantage de détails vous pouvez rechercher sur notre site l’édition du 6 mars 2016 de la chronique hebdomadaire « Pro Mémoria » consacrée justement aux hélicoptères roumains.