La rétrospective des meilleurs festivals de l’année
Salons du livre, festivals de film, de théâtre, de musique et de littéraire, l’année 2025 a été marquée par de nombreuses manifestations culturelles.
Ioana Stăncescu et Fromenteaud Charlotte, 26.12.2025, 10:17
BookFest
Le Portugal a été le pays invité d’honneur de la 18ème édition du Salon du livre Bookfest qui a eu lieu à Bucarest du 28 mai au 1er juin 2025. L’occasion pour le public roumain de faire la connaissance de quelques grands noms de la littérature contemporaine portugaise, tels Gonçalo M. Tavares ou encore José Luís Peixoto, mais aussi de participer à des débats littéraires et des tables rondes portant principalement sur les thématiques de la littérature de nos jours. Le pavillon B 2 du Palais des expositions Romexpo a accueilli plus de 155 participants, principalement des maisons d’édition des plus connues telles Humanitas, Polirom, Litera, Trei, Nemira, Vremea ou Curtea Veche. De nombreux auteurs roumains ont été présents sur le salon, soit pour lancer leurs derniers titres, soit pour participer à des débats ou tout simplement, à dédicacer leurs ouvrages. Et comme le dernier jour de Bookfest a coïncidé avec la Journée internationale de l’Enfance, les organisateurs du salon ont prévu des ateliers de lecture et des activités adaptées aux jeunes lecteurs, afin d’encourager l’intérêt pour le livre dès un âge très tendre. N’oublions pas, que la Roumanie se trouve en queue du classement européen quand il s’agit de la place que la lecture occupe dans le quotidien des Roumains. Selon une enquête récente, en Roumanie, seulement 30% de la population a lu au moins un livre dans le courant de 2022, un pourcentage qui place le pays derrière les autres pays européens. Au pôle opposé, on retrouve le Luxembourg, le Danemark et l’Estonie.
Le TIFF : Le Festival International du Film de Transylvanie
Chaque mois de juin, la ville de Cluj-Napoca, au cœur de la Transylvanie, devient pendant dix jours la capitale du cinéma d’auteur en Europe centrale et orientale. Fondé en 2002, le Festival international du film Transilvania (TIFF) s’est imposé au fil des ans comme l’un des rendez-vous cinématographiques les plus importants du continent, à la fois vitrine pour les nouveaux talents et espace de dialogue entre les cinématographies du monde entier. L’édition 2025, la 24e du festival, qui s’est déroulée du 13 au 22 juin, a une nouvelle fois confirmé cette ambition.
Pensé dès l’origine comme un festival ouvert sur l’international, le TIFF accorde une place centrale aux jeunes cinéastes. La Compétition officielle en est l’illustration la plus emblématique : cette année, une douzaine de longs métrages internationaux, signés par des réalisateurs en début de carrière — souvent à leur premier ou deuxième film — se sont affrontés pour décrocher le Trophée Transilvania, la récompense suprême du festival, ainsi que plusieurs autres prix. Dans le même esprit, la compétition « What’s Up, Doc ? », dédiée au cinéma documentaire, a réuni dix films venus de différents pays, confirmant l’attention particulière portée par le TIFF aux formes exigeantes et engagées du cinéma du réel.
L’édition 2025 a également été marquée par la mise à l’honneur d’une grande figure du cinéma roumain contemporain : le réalisateur et essayiste Andrei Ujică. Lauréat du Prix de l’Excellence pour l’ensemble de sa contribution à l’art cinématographique, il incarne un parcours intellectuel et artistique singulier. Installé en Allemagne depuis le début des années 1980, Ujică est l’auteur de documentaires majeurs qui interrogent l’histoire, la mémoire et les images du pouvoir. Sa présence à Cluj s’est traduite par une projection spéciale de son film le plus récent, TWST – Things We Said Today, mais aussi par une master class et plusieurs rencontres avec le public, moments privilégiés d’échange et de réflexion.
Autre temps fort de cette 24e édition : le focus consacré au cinéma estonien. Regroupée sous l’intitulé « Focus Estonia », cette section a permis au public roumain et international de découvrir la vitalité d’une cinématographie encore peu connue en France, à travers une sélection de films récents et de rencontres avec leurs auteurs.
Impossible enfin d’évoquer le TIFF sans mentionner les Journées du Film Roumain, véritable baromètre de la création nationale. Huit longs métrages — dont six documentaires — et vingt courts métrages étaient en compétition pour les trois trophées de la section. S’y sont ajoutées des projections de films roumains récemment primés à l’étranger ainsi que deux avant-premières mondiales présentées hors compétition. La comédienne Emilia Dobrin et le critique Valerian Sava ont, par ailleurs, été distingués pour l’ensemble de leur carrière.
Au-delà des compétitions, le TIFF est aussi une fête du cinéma au sens large : projections en plein air, salles combles, invités venus des quatre coins du monde, et une programmation mêlant films récents et chefs-d’œuvre classiques projetés en versions restaurées. Pour un public français curieux de découvrir la Roumanie autrement, le Festival international du film Transilvania offre ainsi une porte d’entrée idéale : celle d’un pays profondément cinéphile, où le cinéma est vécu comme un espace de rencontre, de mémoire et de création vivante.
Sibiu, capitale mondiale du spectacle, a accueilli comme chaque année le Festival international de théâtre de Sibiu (FITS)
Fondé en 1993 par l’acteur et metteur en scène Constantin Chiriac, le Festival international de théâtre de Sibiu s’est imposé au fil des décennies comme l’un des plus importants rendez-vous mondiaux du spectacle vivant. Fidèle à sa vocation, il a réuni, lors de sa 32e édition de 2025, des artistes internationaux de premier plan et proposé un programme d’une richesse exceptionnelle, porté par la participation de dizaines de pays et par l’organisation de centaines d’événements. Du 20 au 29 juin, Sibiu, ancienne capitale européenne de la culture, s’est transformée en une vaste scène à ciel ouvert. Productions monumentales, installations spectaculaires, défilés, représentations théâtrales, spectacles de feu, concerts live, danses aériennes et interventions artistiques de rue ont rythmé la vie de la ville. À cette effervescence se sont ajoutés des expositions, des ateliers et des conférences, offrant au public une immersion totale dans l’univers des arts de la scène. Pendant dix jours, plus de 5 000 artistes venus de 82 pays ont présenté plus de 840 spectacles, dont plus de la moitié en accès libre, dans l’espace public.
Placée sous le signe de la gratitude, avec le thème « Merci », cette édition a accueilli des stars internationales telles que Bill Murray, Kathleen Turner, Kuranosuke Sasaki ou le violoniste Alexandru Tomescu, tout en mettant largement à l’honneur la scène roumaine, avec notamment Teatrul pe Roţi, Circ Discret, la Şcoala de Circ de Timişoara, le groupe PulsaR ou encore la Fanfare de Cozmeşti. À l’image d’Hollywood, Sibiu possède sa propre Allée des Célébrités. Cette année, sept nouvelles étoiles y ont été ajoutées, parmi lesquelles celles de Kathleen Turner et Bill Murray, ainsi qu’une étoile attribuée à titre posthume au dramaturge roumano-français Eugène Ionesco, figure majeure du théâtre de l’absurde. Le festival s’est achevé en apothéose sur la Grande Place de Sibiu, avec un concert du musicien roumain Damian Drăghici, mêlant influences tziganes, folk, new age et jazz, suivi d’un spectacle multimédia associant musique, drones et jeux de lumière, venu clore une édition spectaculaire et mémorable.
Festival George Enescu 2025 : une célébration exceptionnelle de la musique classique
La 27e édition du Festival de musique classique George Enescu, du nom du plus grand compositeur roumain, s’est déroulée du 28 août au 25 septembre 2025. Créé en 1958, ce festival reste l’un des événements musicaux les plus prestigieux au monde, attirant chaque année des artistes de renommée internationale. Pendant 29 jours, le public a pu profiter d’un programme riche et assister à plus de 90 concerts et spectacles réunissant près de 4 000 musiciens de renom. Parmi les temps forts de cette édition, la grande violoniste allemande Anne-Sophie Mutter a été honorée du Prix d’Excellence du Festival Enescu, tandis que le chef d’orchestre roumain Cristian Măcelaru, directeur artistique du festival et directeur musical de l’Orchestre national de France, a reçu le Prix de la catégorie « Musique symphonique » pour son album consacré aux œuvres de George Enescu. L’Orchestre philharmonique royal de Londres et l’Orchestre de l’Académie nationale Sainte-Cécile ont également marqué les scènes du festival.
Cette édition a introduit de nouvelles approches en intégrant des compositeurs du XXIe siècle et des formations venues d’Europe de l’Est, notamment l’Orchestre de la Liberté d’Ukraine. Les concerts principaux se sont tenus dans les salles emblématiques de Bucarest, telles que la Sala Palatului et l’Athénée roumain, mais pour la première fois, le festival s’est étendu à des espaces non conventionnels, incluant des concerts de rue et même des discothèques, tandis que d’autres villes roumaines, comme Constanta, ont également accueilli des événements majeurs. Enfin, l’Orchestre Royal Concertgebouw des Pays-Bas, l’un des ensembles les plus renommés au monde, a assuré la clôture du festival, offrant une conclusion spectaculaire à cette manifestation culturelle de portée internationale. Avant la fin de l’événement, le public a pu également apprécier un concert de jazz interprété par le Big Band de Radio Roumanie, ajoutant une touche moderne et festive à cette édition exceptionnelle.
Le Festival NoD de Brasov
Un nouveau festival a vu le jour en 2025. Il s’agit du Festival NOD de Brașov qui s’est proposé à rapprocher la littérature, les droits d’auteur et les industries créatives (cinéma, théâtre, musique) dans un format innovant et participatif. Organisé pour la première fois du 25 au 28 septembre 2025, par la revue littéraire Matca et Reading is cool, une communauté de lecteurs qui transforment la lecture en une expérience sociale et créative. Ce festival se veut un point de rencontre entre auteurs, éditeurs, agents littéraires, spécialistes des droits de propriété intellectuelle et lecteurs. Cette année, parmi les invités de marque mentionnons des écrivains célèbres tels, Matthias Enard, Mikhaïl Chichkine, ou Andrei Kourkov, le cinéaste roumain, Cristian Mungiu, ou les auteurs roumains Simona Antonescu, Simona Gosu, Ciprian Macesaru ou Cristian Fulas.
Présente sur place, Radio Roumanie Internationale a eu le plaisir de s’entretenir avec l’éditeur français, David Meulmans, des Editions Aux forges de vulcain et avec l’’écrivain français, Mathias Enard, prix Goncourt de la littérature en 2015 pour son roman Boussole, paru chez Actes Sud. Parmi ses romans traduits en roumains, mentionnons « Parle leur de batailles, de rois et d’éléphants », ou encore « Le Banquet annuel de la confrérie des fossoyeurs ». Les deux entretiens sont à écouter sur notre site internet. Une autre présence extrêmement appréciée sur la scène du festival a été celle du russe Mikhaïl Chichkine, écrivain de premier rang, vivant en exile depuis le début de la guerre en Ukraine, quand il a ouvertement critiqué le régime de Vladimir Poutine. Son dialogue avec le journaliste Horia Ghibutiu a fait salle comble, tout comme la discussion du même journaliste avec l’écrivain ukrainien, Andrei Kourkov. Né en Russie, en 1961, mais vivant à Kiev depuis son plus jeune âge, Kourkov est l’auteur de plusieurs romans célèbres, tels « Le pingouin » ou « Les abeilles grises ». Lors de la soirée littéraire de Brasov, Andrei Kourkov a raconté au public roumain les premiers jours de guerre en Ukraine. Le festival Nod s’est déroulé dans plusieurs endroits de Brașov, tels que l’hôtel Radisson Blu Aurum, le Centre culturel Reduta, ou la librairie Șt. O. Iosif.
Le Festival FILIT de Iasi
Le grand écrivain français, Michel Bussi, maître absolu du suspens et des intrigues policières, a figuré cette année à l’affiche du festival FILIT, de Iasi. Son dernier livre traduit en roumain est Code 612 : Qui a tué le Petit Prince ? Paru en roumain chez Polirom, le roman « passe en revue hypothèses, coupables et mobiles pour mettre en lumière la profondeur de cette œuvre et révéler les secrets d’Antoine de Saint-Exupéry, et de son double de papier », a expliqué l’éditeur. Saint-Exupéry, aviateur mort en juillet 1944 lors d’une mission en Méditerranée dans des circonstances qui restent inconnues, n’a pas eu l’occasion de voir le succès planétaire de son conte, inspiré à l’origine par un accident en Libye en décembre 1935. Michel Bussi reversera ses droits d’auteur à la Fondation Antoine de Saint-Exupéry pour la jeunesse, qui finance des projets dans l’éducation et l’environnement.
Déroulé du 22 au 26 octobre, le festival de littérature et de traduction littéraire FILIT est un des plus grands festivals de littérature et de traduction littéraire d’Europe, a proposé au public plus de 200 événements littéraires, tables rondes, débats littéraires, une nuit blanche de la poésie contemporaine, mais aussi des rencontres entre les lycéens et les auteurs contemporains. Parmi les grands noms de la littérature mondiale présents cette année à Iasi, mentionnons l’auteure anglo-américaine, Tracy Chevalier, auteure des romans « La dame à la perle », « La fileuse de verre » ou encore « La dame à la licorne », l’auteur américain Junot Diaz, auteur de « La Brève et merveilleuse vie d’Oscar Wao », ou encore les écrivains britannique Nick Bradley, géorgien, Leo Vardiashvili ou grec Isidoros Zourgos. Un projet littéraire particulier a mis cette année en lumière les écrivains ukrainiens engagés dans le conflit et dont les noms figurent dans un ouvrage collectif présenté au festival. Un projet tout aussi intéressant a été la table ronde consacrée au programme européen CELA. Soutenu par Creative Europe, le programme est dédié à la littérature contemporaine et à la traduction et il se propose de soutenir et promouvoir des auteurs et des traducteurs littéraires émergents, en facilitant leur mobilité, leur formation et leur visibilité internationale en Europe.
Le salon du livre Gaudeamus
La 32ᵉ édition du Salon du livre Gaudeamus, parrainée par Radio Roumanie a réuni du 3 au 7 décembre plus de 180 exposants et proposé plus de 600 événements éditoriaux. Selon un communiqué des organisateurs, toutes les grandes maisons d’édition roumaines, des agences de diffusion du livre, des éditeurs universitaires, et des distributeurs de musique y étaient représentés. Comme à chaque édition, un espace a été spécialement consacré aux enfants. La présidente d’honneur de cette édition a été la journaliste, l’écrivaine et l’analyste en politique étrangère Sabina Fati, qui a salué l’intérêt croissant du public roumain pour la littérature de non fiction. L’édition 2025 du Salon de Bucarest a clôturé la série d’événements consacrés à la littérature et à l’éducation que la radio publique a organisée tout au long de l’année à travers la Roumanie.