Fumée blanche au Vatican
Le décès, le lundi de Pâques, du Pape François a été suivi à la fin de la période de deuil, par le début du conclave chargé de l’élection d’un nouveau leader spirituel pour les 1,4 milliards de catholiques. Des élections avec un enjeu extrêmement important dans un contexte mondial tellement instable marqué par des tensions et l’imprédictibilité.
Corina Cristea, 23.05.2025, 10:22
Le nouveau pape : Robert Francis Prevost, qui a choisi le nom pontifical de Léon XIV
Les portes de la chapelle Sixtine ont été scellées le 7 mai, selon la tradition, marquant le début du conclave secret censé élire le nouveau chef spirituel et politique de quelque 1,4 milliard de catholiques du monde entier. 133 cardinaux y ont élu le nouveau souverain pontife, successeur du pape François. Le choix porta sur la personne du cardinal américain Robert Francis Prevost, qui a choisi le nom pontifical de Léon XIV. Ce choix, a-t-il expliqué, rend hommage à Léon XIII, pape du XIXe siècle, connu pour sa défense des droits des travailleurs à l’ère de la première révolution industrielle.
Peu après le traditionnel « Habemus Papam », le 267e successeur de saint Pierre s’est adressé à la foule rassemblée sur la place Saint-Pierre. Le nouveau pape a formulé à l’occasion de l’avènement de son pontificat un message de paix, une Église ouverte à tous et la nécessité de bâtir des ponts de dialogue.
Bâtir des ponts de dialogue
George Bologan, ambassadeur de la Roumanie auprès du Saint-Siège explique :
« Le pape est apparu au balcon avec ce message. Il sera un médiateur de paix. Ce fut le salut qu’il a adressé aux dizaines de milliers de fidèles réunis sur la place Saint-Pierre : « Dieu nous aime tous, inconditionnellement. Le mal ne triomphera pas. Unis, main dans la main avec Dieu et entre nous, allons de l’avant ! » Le nouveau pape exprime cette volonté de rassembler ceux qui partagent les mêmes valeurs. Car, en fin de compte, le bien, comme le mal, pénètrent dans le monde à travers nous. L’appel du pape est donc celui d’avancer ensemble, d’avoir le courage, nous qui sommes du côté du bien, de ne pas laisser la place au mal. »
Des dossiers laissés en suspens par son prédécesseur
Mais Léon XIV hérite d’une série de dossiers laissés en suspens par son prédécesseur argentin, note l’agence EFE. L’unité de l’Église figure en tête de liste. En effet, au cours des douze années de pontificat du pape François, une fracture s’est creusée entre l’aile progressiste de l’église et une aile plus conservatrice, très critique à l’égard des ouvertures imposées par le pape défunt. L’unification de ces courants sera donc une tâche stratégique, tout comme la poursuite de la démarche dite de « synodalité », censée faire davantage participer les différentes entités et l’ensemble des fidèles à la vie et à la mission de l’Église.
Autre dossier délicat : les finances du Vatican, en berne face à la baisse des dons. Vient ensuite la question des abus sexuels perpétrés au sein de l’Eglise, car en dépit des réformes engagées par le pape François, de nombreuses associations de victimes réclament davantage des mesures : application rigoureuse des normes dans les diocèses, transparence accrue dans les procédures judiciaires et accélération des enquêtes. Le diaconat féminin et la place des femmes dans les instances décisionnelles de l’Église constituent également un chantier sensible. Depuis la mort du pape François, les espoirs de voir des femmes accéder à la prêtrise semblent s’être estompés. Pourtant, de nombreux groupes catholiques poursuivent leurs revendications.
Enfin, la bénédiction des couples homosexuels reste un point de fracture. Le texte « Fiducia Supplicans », publié par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, qui autorise cette bénédiction, a suscité de fortes oppositions, notamment en Afrique. L’ensemble des évêques africains s’est opposé à ce document et a réclamé des explications au pape François. Léon XIV devra désormais répondre à ces préoccupations, formulées qui plus est depuis un continent où le catholicisme connaît une regain rapide.
Autres défis
Au micro de Radio Roumanie, l’ambassadeur George Bologan met en exergue d’autres défis encore du nouveau pontificat :
« Les enjeux vont de la situation politique internationale, de plus en plus trouble, à l’intelligence artificielle, en passant par des questions spirituelles, culturelles et anthropologiques. Dans cette ère des intelligences, Léon XIV plaide pour une forme d’intelligence spirituelle, tournée vers le sens de la vie. Car dans ce monde saturé d’algorithmes et de données, l’homme continue à chercher sa place. Il a besoin de se reconnecter au sacré, et pour cela, il lui faut un guide. La technologie ne peut pas être une fin en soi. Et je pense que le nouveau souverain pontife va prôner une culture de la rencontre, du dialogue, dans un monde qui érige des murs faits de ressentiments nationaux et qui est de plus en plus tenté par le repli sur soi. »
Le diplomate roumain décrit enfin le pape comme un pasteur sobre, réfléchi, attentif à la liturgie, lieu par excellence de la rencontre entre l’homme et le mystère divin. Il souligne également son charisme, sa solide formation et sa maîtrise de plusieurs langues, un atout qui incarne pleinement la vocation universelle de l’Église du Christ. Premier pape originaire des États-Unis, Léon XIV apparaît déjà comme un bâtisseur de ponts, désireux d’éclairer une humanité désorientée, en quête de repères au sein d’un ordre mondial en crise. (Trad Ionut Jugureanu)