Une décision étonnante
Corina Cristea, 15.02.2013, 14:45
Le 265e Pape de l’histoire de l’Eglise catholique, Benoît XVI, a annoncé qu’il renonçait au pontificat, une décision sans précédent dans l’époque moderne. L’annonce a été faite par le Souverain pontife lui-même, en latin, l’état de santé étant la raison principale de cette démission. Le Pape Benoît XVI : «Je suis arrivé à la certitude qu’étant donné l’âge avancé, je n’ai plus les forces nécessaires pour exercer, comme il se doit, la mission au Vatican. Je suis tout à fait conscient que cette mission, de par sa nature spirituelle, doit être menée à bonne fin non seulement par des faits et des mots, mais aussi avec souffrance et prière. Chers frères bien-aimés, je vous remercie de tout cœur pour tout votre amour et des efforts entrepris pour me soutenir dans ma mission et je vous demande pardon pour tous mes défauts ».
Benoît XVI a été élu à la tête de l’Eglise catholique suite au Conclave de 2005, en tant que successeur de Jean-Paul II. Maintenant, l’annonce concernant le retrait imminent du Pape a surpris le monde catholique et non seulement. Le père Adrian Dancă, chef du Service Roumain de Radio Vatican, estime dans un entretien pour Radio Roumanie que le geste du Pape mènera à une ré-écriture des lois de l’Eglise pour éclaircir le statut de celui qui renonce au Saint-Siège: «Son geste a surpris la législation de l’Eglise, dans le sens qu’une telle possibilité n’est pas prévue, mais il avait déjà annoncé dans un livre d’entretiens en 2010 — « Lumière du monde » – que le pape doit aussi avoir la liberté de démissionner. Son statut va créer un précédent d’une importance extraordinaire pour l’avenir de l’Eglise aussi ».
Adrian Dancă a également parlé de l’importance des années passées par le Pape Benoît XVI à la tête de l’Eglise catholique:«C’est un pontificat de grande importance parce que c’est pour la première fois que le Pape a assumé la liberté d’être soi-même, d’être cohérent dans ses propos et de donner un signal d’espoir à ceux qui font partie de l’Eglise catholique. C’est un grand homme, un grand théologien et un grand prélat. Le Pape montre que l’Eglise catholique doit être libre, répondre de la meilleure manière possible aux exigences de prêcher l’Evangile de notre temps. Du point de vue social, on peut affirmer sans l’ombre d’un doute que son rôle a été déterminant dans beaucoup d’aspects, y compris au niveau de la société civile en Europe. Durant ses voyages apostoliques, partout où il allait, il tenait beaucoup à rencontrer les représentants du monde politique, les représentants de la culture et leur transmettre justement un message de confiance en l’homme. Du point de vue politique, le Saint Père s’est tenu à l’écart des querelles quotidiennes, il a essayé de transmettre aux milieux politiques les valeurs fondamentales à défaut desquelles une démocratie moderne ne peut pas tenir debout. Il a affirmé à plusieurs reprises qu’un Etat libéral et démocratique se nourrit de valeurs qu’il n’est pas à même de se donner et que ces valeurs sont issues des racines judéo-chrétiennes de la culture européenne et de l’Etat moderne ».
La décision du Pape Benoît XVI répond aux canons de l’Eglise catholique qui prévoient qu’un Souverain pontife peut démissionner à condition de le faire de bon gré. De l’avis du professeur en théologie, Radu Preda, la décision de l’actuel Pape de quitter le Saint Siège de cette manière confère une image positive à l’Eglise catholique confrontée dernièrement à plusieurs scandales.
Radu Preda: « C’est un geste plein de dignité qui démontre que personne n’est irremplaçable, quelle que soit la position occupée. En plus, en tant que prélat et leader, il faut chercher à préserver un équilibre entre l’intérêt personnel et celui de la communauté. Or, de ce point de vue, Benoît XVI a choisi sa propre voie qui lui assurera une place à part dans l’histoire de l’humanité. Il aurait pu choisir le modèle de son prédécesseur, le charismatique pape Jean Paul II qui a préféré mourir en fonction, bien que visiblement marqué depuis des années par la maladie, la vieillesse et l’impuissance. Tout comme Jean Paul II, Benoît XVI aurait pu faire la preuve des limites et de la fragilité humaine. Mais, puisqu’il se connaissait mieux que personne, il a préféré emprunter la voie du retrait, avant qu’il ne soit trop tard. Un geste qui lui vaut notre estime. »
Benoît XVI a occupé le Saint Siège dans une période extrêmement difficile quand les changements politiques ont soumis l’Eglise catholique à dure épreuve. Il s’est fait notamment remarquer par ses nombreux messages et prières au service de la paix, par ses appels au dialogue inter religieux et par ses discours au nom des droits de l’homme, de la protection de l’environnement et de la lutte contre la pauvreté. La question se pose maintenant quant à la personne qui succédera à Benoît XVI à la tête de l’Eglise catholique. Mais, avant d’apprendre son nom, on doit dire que cette personne devra répondre aux nombreux défis auxquels se confrontent l’Eglise: le conflit entre les réformistes et les libéraux ou encore les scandales sexuels ou ceux de corruption.( trad.: Ioana Stancescu, Ligia Mihaiescu)