La menace de l’islamisme radical en Afrique du nord
Deux ans après le début du « printemps arabe », mouvement qui a renversé plusieurs dictateurs de pays arabes, les effets dans les pays de l’Afrique du Nord et du Proche Orient demeurent incertains. Les experts et les analystes internationaux ont remarqué, dans nombre de ces pays, que la déception et la révolte de la population ont souvent remplacé l’euphorie. Les changements de régime dans la région et la transition vers la démocratie ont eu des effets pervers en Egypte et en Libye.
România Internațional, 08.02.2013, 15:15
Ces évènements ont marqué le début d’une période de chaos, de violences et de mécontentements qui ont permis une montée du fondamentalisme religieux et la création d’un bassin d’opérations de groupes armés extrémistes associés aux mouvements terroristes. Pendant la précédente décennie, les grandes puissances occidentales se sont concentrées sur les interventions en Afghanistan et en Irak.
Entre temps, l’Afrique, continent marqué par le croisement de la pauvreté avec l’instabilité politique, est devenu un champs de manœuvre des mouvements islamistes. Les récents événements au Mali et en Algérie ont rappelé à la communauté internationale l’existence d’une menace majeure dans le nord de l’Afrique : l’islamisme radical, qui risque d’être projeté en Europe aussi.
Le 11 janvier, à la demande des autorités maliennes, Paris a lancé l’opération Serval, un assaut aéro–terrestre censé bloquer une offensive vers le sud des groupes islamistes armés, dont certains sont liés au réseau terroriste Al-Qaïda. Ceux-ci contrôlaient le nord du pays depuis plus de neuf mois. L’offensive franco-malienne a libéré les plus importantes villes du nord et du nord-est : Gao, Tombouctou et Kidal, à la frontière avec l’Algérie.
Le président français, François Hollande s’est rendu au Mali où il a affirmé que son pays n’avait pas achevé sa mission, que le terrorisme avait été seulement « repoussé », « chassé » mais « pas encore vaincu ». Le président Hollande a visité la ville de Tombouctou, une des villes les plus mutilées par la guerre où il a dénoncé la barbarie et les abus commis ces derniers mois par les islamistes radicaux au nom de la loi islamique, la charia. Les effets des événements au Mali ont rapidement traversé la frontière avec l’Algérie où une attaque terroriste sans précédent sur un site gazier, a eu lieu en guise de réponse à l’opération Serval. Plusieurs dizaines d’ouvriers étrangers, dont des Roumains, ont été pris en otage. L’intervention en force des autorités algériennes, controversée et même critiquée par l’Occident, s’est achevé par un bilan tragique : 40 otages, dont deux Roumains tués.
Le conseiller présidentiel Iulian Chifu évoque ces deux évènements : « Ce sont deux thèmes différents qui finissent par converger, vu qu’il s’agit d’une zone très volatile, d’une zone saharienne, d’une zone où il y a des Etats post — coloniaux dont les frontières étendues sont difficiles à contrôler. Ces Etats-là n’ont pas la possibilité de maîtriser les zones où ces groupes radicaux, terroristes, djihadistes, vivent et stockent leurs armes. D’autre part, on ne devrait pas blâmer à priori la manière dont a été menée l’intervention en Algérie. C’est l’un des peu nombreux régimes encore capables de lutter contre ces groupes radicaux. C’est un régime qui a eu à choisir entre laisser ce groupe partir avec les otages qu’il allait tenter de vendre par la suite pour des sommes exorbitantes — une formule de financement qui engendre de nouvelles attaques terroristes, prises d’otages – et intervenir brutalement ; c’est ce qu’Alger a fait, d’une manière d’ailleurs efficace, pour prendre le contrôle, considérant qu’il était utile que ce type d’intervention bloque la création d’un précédent et décourage les attaques dans cette zone riche en pétrole et en gaz».
Les événements au Mali et en Algérie ont déterminé la tenue à Bruxelles d’une réunion extraordinaire où les chefs des diplomaties des Etats membres de l’UE ont donné le feu vert à une mission chargée de la formation et de la réorganisation de l’armée malienne. 500 personnes de 15 Etats prendront part à cette mission qui deviendra complètement opérationnelle le mois prochain.
En tant que membre de l’UE, la Roumanie a décidé d’y participer elle aussi. Le Conseil suprême de défense du pays a approuvé l’envoi de 10 militaires dans ce pays africain. Bucarest a souhaité ainsi réaffirmer son engagement dans la lutte antiterroriste et la garantie de la sécurité internationale, aux côtés de ses partenaires de l’UE et de l’OTAN. Certains se sont même demandés si la décision de Bucarest de participer à la mission au Mali était symbolique ou bien utile.
L’analyste militaire Ion Petrescu répond : « Les dix militaires sont très utiles. Il ne faut pas oublier qu’il s’agit aussi bien de formateurs que de spécialistes des questions relevant de l’Etat major. Coopter des militaires roumains de haut niveau dans les structures d’Etat major mises en place par l’EUCOM — le Commandement des forces des Etats-Unis en Europe, témoigne du respect envers l’expérience militaire roumaine. Ce sont des professionnels riches de l’expérience que l’Armée roumaine en général a gagné sur les trois théâtres d’opérations militaires : l’espace ex-yougoslave, l’Irak et l’Afghanistan. »
Par ailleurs, Paris envisage de réduire à partir du mois prochain sa participation militaire au Mali, si la situation sur le terrain le permettait. La France et les Etats-Unis ont souligné que la mission de garantir la sécurité, l’intégrité territoriale et la souveraineté de ce pays revenait à la Force africaine du Mali, qui devait être placée aussi vite que possible sous l’autorité de l’ONU. Cette force devrait être constituée de 6000 soldats environ. (trad.: Alexandra Pop, Alex Diaconescu)