Une grande figure de la résistance politique anticommuniste pendant les décennies noires de l'époque communiste.
Corneliu Coposu a été une grande figure de la résistance politique anticommuniste pendant les décennies noires de l'époque communiste, mais il fut également l'homme politique ayant joué un rôle essentiel dans la renaissance de la démocratie roumaine et du multipartisme après 1989. Il fit de la sorte le lien entre la démocratie d'avant-guerre, celle qui précéda l'instauration du communisme d'après la guerre, et celle qui allait renaître au début des années 90 du siècle passé. Sa foi inébranlable dans la démocratie, dans l'esprit de résistance et dans la nation roumaine, le modèle de lutte pour l'honneur, pour la liberté et la justice qu'il incarna, notamment par les 17 ans de traversée du Goulag roumain, l'érigent sans nul doute parmi les grandes figures du Panthéon des hommes d'Etat que la Roumanie compte dans son histoire récente. A la fin de sa vie, Corneliu Coposu se faisait, à bon escient, appelé par ses jeunes partisans, le « Sénior ».
Né le 20 mai 1914 dans le département de Salaj, en Transylvanie, dans une famille de prêtres grecs-catholiques, Corneliu Coposu fait des études de droit, devient avocat, pour décrocher ensuite un doctorat ès sciences juridiques à l'Université de Cluj. Il parvient à devenir un des plus proches collaborateurs du président du Parti national paysan, Iuliu Maniu, figure historique de l'émancipation nationale des Roumains de Transylvanie, auquel l'unissent des liens familiaux et, surtout, son crédo politique. Dans la période trouble de la fin de la guerre et de l'occupation soviétique de la Roumanie, Corneliu Coposu devient secrétaire personnel du leader national-paysan et secrétaire général adjoint de son parti. Le 14 juillet 1947, Coposu, à l'instar de la quasi-totalité des leaders de son parti, est arrêté, suite au guet-apens imaginé par le nouveau pouvoir communiste. Le même pouvoir communiste qui s'était installé, pour 43 ans, au mois de novembre 1946, après avoir falsifié les résultats des élections, à l'ombre et sous la protection des chars russes et de la Commission alliée de contrôle, dirigée, à Bucarest, par les Soviétiques. Condamné aux travaux forcés à perpétuité sur la base d'un dossier monté de toutes pièces, il ne sera libéré qu'en 1964, à la faveur d'une amnistie générale des prisonniers politiques, après avoir passé 17 ans au Goulag roumain, dont 9 à l'isolement.
Mais, Corneliu Coposu survécut dans la dignité à ce calvaire prolongé. Son épouse, Arlette, d'origine française, prisonnière politique à son tour, mourut quelques mois après sa libération, en 1965.
Interviewé en 1993 et provoqué à un exercice d'imagination par la journaliste Lucia Hossu-Longin, qui voulait savoir s'il aurait choisi la même voie pour autant que le choix se présentât devant lui à nouveau, Corneliu Coposu a répondu par l'affirmative : « Ecoutez, j'ai eu le temps de passer en revue toutes les souffrances, les misères endurées pendant mon emprisonnement, puis le nombre et l'ampleur des persécutions vécues après la libération. Mais je ne pense pas avoir le choix. Les yeux fermés, je choisirais de vivre le même destin. Peut-être que notre destin est écrit d'avance. Je ne suis pas fataliste, mais si j'avais cette alternative devant moi, je choisirais, le même chemin sans hésiter ».
Côtoyer de tels personnages est un privilège rare. C'est le pénitentiaire politique de Râmnicu Sărat qu'a le plus marqué Corneliu Coposu, l'homme qui fera renaître le Parti national paysan chrétien-démocrate et en deviendra le président, après 1989.
Corneliu Coposu : « Le pénitentiaire de Râmnicu Sarat comptait 34 cellules, 16 au rez-de-chaussée et tout autant au premier étage. 4 cellules d'isoloir étaient situées au sous-sol. C'étaient des cellules de 3 mètres sur 2, disposées en rayons de miel, l'une à côté de l'autre. A 3 mètres de hauteur, on trouvait une fente de lumière, à laquelle on n'avait en revanche pas d'accès, et qui était d'ailleurs condamnée de l'extérieur. La seule source de lumière, allumée en permanence, provenait d'une ampoule de 15 watts, suspendue au plafond, et qui donnait une lumière sépulcrale. Passons le chauffage, car il n'y en avait pas, il s'agissait d'un bâtiment érigé aux environs de l'an 1900, avec des murs épais et entourés de deux autres murs d'enceinte d'une hauteur de 5-6 mètres. Des gardes armés guettaient, perchés dans leurs tours de garde. Il y régnait une atmosphère sinistre. »
Corneliu Coposu a marqué durablement la conscience collective roumaine, par la sérénité avec laquelle il a accepté son sort et par sa capacité singulière de pardonner à ses bourreaux. Plus encore, il a marqué ses contemporains par l'obstination avec laquelle il a mené sa lutte pour la liberté, la démocratie, pour l'idéal national et en faveur du système monarchique, qu'il avait investi, jusqu'à la fin de sa vie, de tous ses espoirs. (Trad. Ionut Jugureanu)
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